09/03/2017
Un poème de la veille signé Roger Lahu que même il m'est dédié à moi
SUR LE TERRAIN
à Fred
grand reporter du guère
« sur le terrain » du moins que rien
du si peu du presque pas :
mes immédiats alentours
dans toute leur fadeur
triomphale
ce jour d’hui ça bouillasse
à qui mieux mieux
à cause de la tempête « zeus »
patures marécageuses
« on dirait des rizières »
me pensè-je
et la petite route en bas du hameau
sera sans doute « submergée »
par le ruisseau ce soir
et la rivière la mienne « ma » rivière
court court court
comme une dératée
25 m3/sec
le temps que ça lui prendra
pour dégonfler
l’ouverture de la pêche
dans quelques jours
c’est rapé
grand reporter du guère
du presque pas
mais qui quand même …
Roger Lahu
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08/03/2017
Chez mon prochain éditeur
Il y avait plusieurs tables dressées pour deux congrès, dans la salle à manger immense, toute neuve, pompeuse, néo-Empire. Il s'est produit de la bousculade parmi nous, et je suis à peu près certain que mon ami et moi nous sommes fourvoyés dans le congrès où nous n'étions pas conviés. Par bonheur, cela n'a eu aucune conséquence fâcheuse. Tout le monde a été fort aimable à notre égard. J'avais pour voisin un ophtalmologiste viennois ; ce devait être un congrès médical. Derechef, j'ai constaté l'absence des femmes, à l'exception de serveuses en costume régional. Où s'enclôtissent les dames italiennes ?
Henri Calet, "L'Italie à la paresseuse", éditions Le Dilettante
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14/02/2017
Relire quelqu'un qui manque...
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02/02/2017
Papiers etc.
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20/01/2017
"FOND DE CANTINE" de Drieu La Rochelle (#3)
VENGEANCE
J’ai bu quatre bouteilles avec mes compagnons.
Qui d’entre nous fut plus bouffon
Que moi qui feignais la douceur ?
Trinquant d’un geste bénisseur
Je les encourageais à souiller de dédains
Les héros et les saints
Et l’orgueil de mourir
Grave frivolité
Pour une idée.
Eux donc me méprisaient non sans cordialité
D’être homme intelligent, de payer ce délice
Et de feindre des amours vaines
Pour quelques sacrées rengaines.
Je riais narquoisement
Et tout bénignement
Faisant ma prière
Au dieu de la guerre
Et des révolutions
Vouais à la juste gueule de ses puissants canons
Ces bons compères
Mes compagnons.
Pierre Drieu La Rochelle, « Fond de cantine » (1920)
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07/01/2017
"FOND DE CANTINE" de Drieu La Rochelle (#2)
Dans le palais rouge, la dactylo papote tandis que les chefs tout neufs s’exhortent à commander : Chut ! le peuple vient de se retirer de la maison des jeunes mariés.
Devant le palais rouge, la mitrailleuse n’a pas l’air militaire. Un gros tube clos. Derrière le bec de gaz, par un petit trou, il en perce un regard oblique. On entend un tic-tac, le pas d’un ataxique. Cela débite à l’aveuglette des balles qui cinglent le pavé, pelletée de sable municipale.
Des soldats sur leur derrière font la guerre à leur façon.
Le taillis des machines dans l’atelier désert s’empêtre de courroies et de lianes. La matière se vautre dans son inertie au fond de la mine.
La dactylo tapote le verbe sur les feuilles touffues. Comme un démiurge trie les atomes, elle élit les touches. Le futur, infini, jusqu’à la dernière minute, se rétrécit soudain à la fatalité de l’alphabet.
La danseuse impériale se révolte contre le peuple parce qu’on ne trouve plus certains onguents pour ses pieds qui seuls peuvent débrouiller les figures de la beauté.
Cachant sous sa langue l’ordre de mobilisation révolutionnaire, l’envoyé débarque sur un continent placide et téléphone au camarade effaré.
Des armées victorieuses, ayant épuisé toute fureur, se complaisent, au bord d’un fleuve, en des musiques démodées.
Dans la terre slave aux chimies dissolutrices de l’esprit, la barbe de Tolstoï fleurira-t-elle perce-neige ?
Pierre Drieu La Rochelle, « Fond de cantine » (1920)
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04/01/2017
John Berger (1926-2017)
Nous ne sommes que le petit côté des choses. Il faut faire corps avec leur centre.
Propos d’un vieux paysan savoyard (venant de perdre sa femme) à l’écrivain anglais John BERGER
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30/12/2016
"FOND DE CANTINE" de Drieu La Rochelle
(…)
– Holà terre ! quelqu’un sur la terre.
Nous ne ferons aucune tentative vers les étoiles.
Nous ne demanderons pas la lune au central solaire.
Vous hommes
Vous – hé – holà – vous.
– Qui est là ?
– Nous les habitants des Pays Extérieurs, nous les Scythes à vous les Anciens d’Occident.
Il vient de se passer en nous quelque chose d’extraordinaire. Nous voudrions vous le communiquer.
– Nous vous déclarons le silence.
(…)
Pierre Drieu La Rochelle, « Fond de cantine » (1920)
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08/12/2016
Dignité
J’ai toujours voulu vous remercier de m’avoir sauvé de ce matelas par terre, 8ème Rue. C’était super de votre part. Je ne sais pas moi-même... comment j’ai réussi à faire un tel gâchis de ma vie. Je ne vous l’avais encore jamais dit, mais juste avant notre rencontre j’ai fini par me tirer d’une maladie assez embarrassante dont je ne sais pas, aujourd’hui encore, comment je l’ai attrapée. Quelques semaines plus tôt, deux hôtesses de l’air avaient débarqué, l’une d’elle avait passé un bout de temps au Brésil, ce doit être elle qui me l’a repassée. En tout cas, en ce temps-là, je travaillais comme garçon de salle au Hickory House, là où il y a le fameux piano-bar en forme de fer à cheval (je crois que ça, je vous en parlé). Moi, j’étais chargé de la grande table de derrière, celle qui était toujours réservée à Duke Ellington et à sa famille. Je ne pourrai jamais l’oublier, assis là avec ses cravates et ses costumes argentés, entouré de sa femme et de ses filles. Si j’ai jamais vu quelqu’un de royal, c’est bien lui. Il émanait de lui une dignité naturelle extraordinaire, une bonté qui semblait passer à travers ses enfants. Je me rappelle avoir regardé ses longs doigts bagués rompre un morceau de pain pendant que je leur versais de l’eau glacée et que je posais le beurrier, et m’être dit : « Voilà, voilà les doigts qui jouent Satin Doll ! Ces doigts-là ! » Je souffrais un tel martyre à ce moment, entre les jambes, que je devais marcher en canard pour éviter le moindre frottement. Et c’était un restau vraiment chic, alors j’essayais de faire aussi discrètement que possible, autrement le maître d’hôtel m’aurait repéré et viré sur-le-champ. Mais croyez-moi, c’était une douleur incroyable.
Et puis, par sa seule présence, le « Duke » m’a fait tout oublier un instant, et je me suis pris à rêver qu’un jour je serais un patriarche bienveillant, avec une épouse et des enfants splendides, qui ne hurlent jamais.
En tout cas, merci pour les superbes croissants à la confiture, et la vue sur Spanish Harlem.
Bien à vous.
4/5/495, Scottsville, Virginie.
SAM SHEPARD (Balades au paradis, Editions Robert Laffont, trad. Bernard Cohen)
01:36 Publié dans où je lis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dignité, sam shepard, shepard, bernard cohen