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25/04/2012

SI TANT EST

 

à l’heure où l’ami découvre

le dessous des cartes

à l’heure où

peut-être

il découvre le visage de ses nouveaux parents

oui

me reviennent les souvenirs d’une discussion

que j’ai eue avec lui

au sujet de la réincarnation

nous étions dans sa chambre d’hôpital

et avions fini de nous moquer

des programmes de la télévision

et de la laideur de l’infirmière

et tranquillement

nous avons évoqué les différents scénarii possibles

qui nous verraient nous rencontrer à nouveau

dans de prochaines vies

cela nous a pris un certain temps

 

F.Houdaer

 

08/04/2012

Publications en revue...

Une nouvelle fois, suis publié dans "Microbe", la meilleure revue de poésie du monde...

microbe70.jpg

... ainsi que dans P.L.S, la revue annuelle de la Sorbonne (j'attends qu'ils m'aient envoyé un exemplaire pour en scanner la couverture).

Quel lien ? Voilà que je retrouve au fin fond du disque dur de mon ordinateur un texte de Jim Harrison (archivé depuis combien d'années?). Et dans ce texte, ces quelques lignes :

 

«  La poésie vient quand elle veut et je n’ai jamais eu la moindre idée sur la façon de la faire apparaître. 

Qui sait ce qui provoque l’ouverture ou la fermeture de la porte .

Il y a toujours eu parmi les poètes, pendant les périodes "ramollies" une tendance a limiter eux-mêmes leurs meilleurs efforts, mais cela apparaît désagréablement évident à leurs lecteurs. C’est un peu comme essayer de susciter un fantasme sexuel convaincant et se trouver interrompu (en si bon chemin …) par votre mère qui téléphone pour savoir pourquoi vous êtes toujours un "saltimbanque" à 59 ans. »

  

23/01/2012

LA FRANCE N'EXISTE PAS (extrait d'un looooong chantier poétique en cours)

Jeanne d'Arc est tombée dans le trou

au milieu de la table

elle y a disparu

emportant avec elle nappe et couverts

avant que l'oncle n'ait eu le temps de servir l'apéro

à moi de jouer maintenant

comment mettre tout cela

à ma main ?

je cherche avec qui commencer

avec quelle couronne

tombée

ramassée

volée

faire sonner le début du premier épisode

je crains les génériques trop longs

pleins de prénoms et de chiffres

je réfléchis à la première bouse de cheval

au premier crottin

dans lequel flanquer mon gaulois d’ancêtre

je subodore le système D requis

pour sauver sa peau au Moyen-Âge

le jeu des chaises musicales

reste de toutes les époques

pour ceux qui ont la chance d’avoir des chaises chez eux

et tous ces artistes officiels

qui n’ont pas toujours manqué de génie

pour servir leurs maîtres

ne m’inspirent qu’une moue polie

je sais bien que

pour finir grand jardinier de Versailles

il vaut mieux naître déjà fils de grand jardinier

j’ai toujours su que les jardiniers étaient des putes

et des fils à papa

au point où j’en suis

de ma relecture

je file tout droit aux incontournables

Napoléon pour commencer

Napoléon qui s’auto-proclame empereur

qui s’auto-sacre

le saint patron de tous les écrivains qui s’éditent à compte d’auteur

et pourquoi pas ?

j’oublie ceux qui l’ont maudit dans toutes les langues

j’oublie les produits dérivés

 

(...)

 

et à Lyon

où je vis aime et écris ?

à Lyon

les Canuts se sont battus

les Canuts ont perdu

et beaucoup de choses qui ont été écrites à leur sujet

relèvent de la très mauvaise littérature

 

(...)

 

dans les années 70

du vingtième siècle

un président de la république française

pond une anthologie de la poésie française

c’est dire s’il est cocu

et malade

 

(...)

 

et il y a tout ce qu’on n’apprend ni en cours d’histoire

ni en cours de français

Casanova

devenu Maçon à Lyon

qui écrit ses Mémoires dans la langue de Poquelin junior

(...)

 

F.Houdaer

25/09/2011

EXTRAIT DE L'UN DE MES TEXTES LUS...

... la veille :

 

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(Photos de Pauline Catherinot)

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les eaux usées

qui coulent sous ma ville

viennent de faire l’objet d’une étude très sérieuse

d’où il résulte

que chaque lyonnais consomme en moyenne

un kilo d’héroïne

et autant de gaufres liégeoises

par an

 

pendant ce temps

des employés des espaces verts

font pousser dans un square

les tours du World Trade Center végétalisées

pour commémorer le dixième anniversaire du 11 septembre

et personne n’a l’idée de passer

commettre un attentat

à l’aide d’une tondeuse

 

pendant ce temps

une fillette s’étouffe avec un pois chiche

lors de son anniversaire

a-t-on idée de manger du pois chiche

le jour de son anniversaire ?

 

pour le reste ?

rien à signaler

ou pas grand-chose d’autre

à un détail près

 

(...) 

parce qu’il va bien falloir en parler

de la queue de poisson cosmique

de mon dernier et méchant rêve

dans lequel je créée un nouveau parc d’attraction

POESIELAND

(...)

il va bien falloir en parler

de ce manifeste

rédigé un soir de jeun

puis brûlé un soir de cuite

un texte dont je ne me souviens que de la première phrase

ne montre pas ton cœur

 

11/09/2011

QUE FAISIEZ-VOUS LE 11 SEPTEMBRE 2001…

… QUAND VOUS AVEZ APPRIS L’INCROYABLE NOUVELLE ?

 

 

j’enfouissais dans le sol

 

très précisément sous le gazon du square

 

qui jouxte mon immeuble

 

la photo de mon éditeur

 

toute piquetée de trous d’aiguilles

 

elle était accompagnée

 

d’une statuette de terre

 

sur laquelle j’avais pissé une semaine durant

 

en récitant une litanie injurieuse

 

je commençais à couvrir de terre

 

la face de mon éditeur

 

quand mon portable a sonné

 

pour m’apprendre le sort des Twin Towers

 

 

si

 

dans les mois qui ont suivi

 

le responsable des attentats du 11/09

 

n’a pas été arrêté

 

mon éditeur lui

 

a connu les pires tracas

 

des huissiers ont débarqué dans ses locaux

 

posé des scellés sur ses ordinateurs

 

tandis que je rêvais à deux piles de livres

 

deux piles de livres assez grandes

 

pour briser ses pieds

 

en lui tombant dessus

 

 

moralité ?

 

ben laden court toujours

 

et vu l’importance de sa progéniture

 

le jour de la fête des pères

 

doit être un sacré bon moment à passer

 

pour lui

 

(Lyon, le 26 février 2009)

23/08/2011

MAKING-OFF

la fenêtre de mon bureau

donne sur un chantier tout frais

cela ne ressemble encore qu’à un vaste trou

j’ai compté cinq types différents d’engins

à s’être donnés rendez-vous en bas de chez moi

plusieurs équipes sont sur le coup

même si la plupart n’ont

pour le moment

fait que de se croiser

et prendre leurs marques

moi

le seul effort que je me suis demandé

est de prendre une photo par jour

de l’avancée des travaux

 

je n’ai pas tenu la promesse

que je m’étais faite

 

depuis

j’observe le boulot des gars

non sans une certaine aigreur

j’applaudis

à la pluie

qui vient contrarier la bonne marche du chantier

mais cela ne suffit pas

la place en bas de chez moi finira bien par être refaite à neuf

et ce jour-là

je n’aurai plus qu’à partir

 

extrait de "ENGEANCES" à paraître en janvier aux éditions La Passe du Vent

25/06/2011

OÙ JE DÉCOUVRE QUE JE NE SUIS PAS UN POÈTE FRANÇAIS

si j’en crois cet ami

 

je me fondrais parfaitement dans le paysage littéraire québécois

 

ou belge

 

c’est sûr

 

mais pas dans l’hexagonal

 

je semble ne pas m’en rendre compte

 

et surtout

 

surtout

 

mes poèmes sont incorrigiblement narratifs

 

mes références ?

 

pas assez

 

ou trop

 

Apollinaire

 

Cendrars

 

sûr qu’ils ne sont pas français quand on y regarde de plus près

 

et je n’évoque même pas Brautigan et les autres

 

je ne puis que donner raison à cet ami

 

qui ignore à quel point il met dans le mille

 

j’espère qu’il sera là

 

pour enregistrer mes dernières paroles

 

ce FUCK MALLARMÉ

 

que j’aimerais pouvoir lâcher

 

in extremis

 

 

F.Houdaer

16/06/2011

2009

cela s’est passé l’année

où j’ai commencé à porter des chemises à fleur

oh rien de trop voyant

nulle couleur criarde dans mes tenues

juste des motifs végétaux

des tulipes stylisées

pour qui savait voir

des arabesques de terre et de bronze

je voulais bien devenir un homme vert

à condition de garder une certaine classe

je connaissais encore le nom du président de la république

j’étais encore capable d’énumérer

ma date de naissance

mon code de carte bleue

je n’avais vu de tsunami

qu’au cinéma

 

F.Houdaer

12/06/2011

"QUELLE PLACE POUR L’AUTEUR ?"

Comme promis, l'article publié dans le numéro de juin de "LIVRE & LIRE", le journal de l'Arald:

 

"QUELLE PLACE POUR L’AUTEUR ?

Fichue bonne question, qui mérite une fichue bonne réponse. Plurielle.

L’auteur, je le vois…

a) jamais très loin d’une cafetière.

b) dans une boutique Corep. La scoliose penchée sur la photocopieuse (pas du tout comme une secrétaire lascive). La même position que quinze années plus tôt, lors qu’il reproduisait en x exemplaires son premier manuscrit.

c) dans une salle des profs (énième atelier d’écriture à animer dans un bahut), lieu emblématique, pas forcément glauque mais où la non-beauté atteint sa forme d’expression la plus achevée (des chaises aux classeurs). Où trône aussi une photocopieuse, celle-là même que l’auteur, selon toute logique, finira par épouser.

Quelle place pour l’auteur ? Pas n’importe où. Le lieu compte, le micro-climat joue en sa faveur ou en sa défaveur (on s’est beaucoup moqué de Nietzsche et de ses écrits météorologiques sur le sujet, on a eu tort).

Après, on peut bien parler d’épreuves nécessaires, histoire de voir ce qui résiste à l’inconfort. On peut…

On ne connait pas toujours la place de l’auteur, mais on sait où il habite. Les huissiers finissent toujours par le trouver.

Ce n’est pas le plus important.

Quant bien même aurait-on réussi à cartographier l’écriture et ses différents territoires, l’auteur ne risquerait pas d’y trouver sa place marquée d’un gros point rouge  « VOUS ÊTES ICI ».

Quelle place pour l’auteur ? Question risible ou à pleurer ? À creuser, en tout cas… à la faveur d’une dispute avec un ami intermittent au sujet du fameux « statut », d’une cuite avec un libraire au dos précocement fragilisé, d’une amende à régler auprès d’une bibliothécaire puisque « non, Monsieur, quand on emprunte un livre de la Pléïade, ce n’est pas pour le lire dans son bain et le faire tomber dans l’eau ».

La place de l’auteur, dans tout cela ? La mienne ? Au sein d’une chaîne, indiscutablement. Celle du livre, à l’intérieur de laquelle on ne sait parfois plus, de l’éditeur, du libraire ou de l’auteur, qui est le boulet de qui.

 

F.Houdaer "