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26/09/2007

Journal de bord stéphanois #1

Dans le cadre de son vingtième anniversaire, le Musée d'Art Moderne de Saint-Etienne accueille la compagnie In-Time en résidence (j'ai déjà travaillé avec cette compagnie pour "Empty").

Je prépare un texte pour un spectacle d'une heure. La mise en scène sera assurée par Carine Pauchon.

Exhibitions (journal de bord #1)

 

Fin d’un cycle, le premier : celui des « petits-déjeuners » au cours desquels Carine Pauchon et moi-même avons rencontré la plupart des membres du personnel. Service par service. Autour d’une « installation de viennoiseries » (premier effet collatéral : + deux kilos à la balance).

La parole a fusé. Les anecdotes ont plu. Autour de la même table pouvaient se retrouver un agent travaillant pour le musée depuis un mois, et un autre ayant vécu l’inauguration du musée.

En six matinées, aucune redite (ou presque), des récits de vie comportant des épisodes (en lien avec le musée) parfois inouïs.

Richesse du matériau, donc. Et mon chantier, concrètement ? Il ressemble à tout chantier qui débute : d’un côté, un trou. De l’autre, un amas de… notes.

De toutes ces paroles, que faire ?

Réponse de L-F Céline, parlant du « style » et du travail de l’écriture… De mémoire : Céline montre un bâton parfaitement droit, et rappelle que s’il le plonge dans l’eau, le bâton paraît tordu. Conclusion (provisoire) : « si je veux que mon bâton paraisse parfaitement rectiligne, une fois plongé dans l’eau… je dois le tordre avant de le tremper ».

C’est ce que je suis en train de faire actuellement. Je tords et déforme les propos, les souvenirs de certains membres du personnel… dans l’espoir qu’ils les reconnaissent.

A suivre…

21/07/2007

Fantaisie urbaine (2)

SAINT-PAUL & JOSEPH

Vous souvenez-vous du feuilleton « Mickey à travers les siècles » ? A la fin de chaque épisode, notre brave souris prenait un coup derrière ses deux grandes oreilles, se faisait assommer pour se réveiller… à une autre époque.

La première impression lors d’une visite à la Prison Saint-Paul est du même ordre. D’abord, le coup d’assommoir. Ensuite, les vieilles pierres, l’espèce de donjon dans la cour d’entrée, le moyen-âge carcéral. On se surprend à constater que les surveillants ne portent pas d’armure.

Une nouvelle louche d’histoire : Saint-Paul et Saint-Joseph, deux prisons sises en lieu et place du Palais Impérial que Napoléon voulait faire construire (projet qu’il ne put concrétiser en raison d’une excursion moscovite à entreprendre).

On l’ignore également, mais le tunnel sous la Manche a été creusé à Lyon il y a plusieurs dizaines d’années. Il relie les deux prisons mentionnées plus haut. Le personnel pénitentiaire l’emprunte tous les jours, évitant les flaques d’eau et tout ce qui peut suinter du mur et des plafonds, de la ville et de la société. Marcher dedans ne porte pas bonheur.

Aujourd’hui, la prison Saint-Paul est en sursis. Comme les gars qui croupissent dans son ventre, qu’elle n’en finit pas de digérer comme s’il s’agissait de grattons.

Demain, Saint-Paul sera devenue une musée-prison à l’instar de celles qui existent au Canada. On y organisera des visites pour les scolaires, pour les seniors… On louera ses murs pour des tournages de films historiques, des navets coûteux du style « La revanche du Masque de fer contre le fils de Monte-Christo » avec l’aide de Rhône-Alpes Cinéma et les prestations du petit-fils de Gérard Depardieu ainsi que de la fille de Vanessa paradis. Le premier coup de manivelle sera donné par l’increvable Josée Dayan.

Monseigneur Barbarin aime à rappeler, de sa voix de Daffy Duck possédé, que « aller à Saint-Paul, c’est aller à la Vérité ». Il ne précise pas s’il évoque l’apôtre ou la voisine honteuse du centre de Perrache. Ne doutons pas qu’il s’adresse à quelques notables. Question : ses coups de crosse sont-ils assénés à fin de réveiller ou d’endormir son monde ?

15/07/2007

DÉMÉNAGEMENT À LA DUCHÈRE

Karl quitte Samia. Karl est mon ami. C’est lui qui est venu me chercher à ma sortie de taule, six mois plus tôt. Aujourd’hui, il me demande de l’aider à déménager quelques affaires.

-  Samia est au courant ?

-    C’est elle qui m’a dit de venir chercher mes bouquins. Elle m’a dit qu’elle en avait marre de vivre au milieu de mes machins. Paraît que les gamins en ont marre aussi.

J’ai connu Samia et les gamins. C’est avec eux, avec toute la petite famille de Karl que j’ai fait ma première balade à la campagne, le jour de ma remise en liberté.

-  Ils seront là quand on viendra jouer aux déménageurs ?

-    Samia et les gamins ? C’est prévu qu’ils partent en week-end. On les croisera pas.

-  On a deux jours ?

-    On a une demi-journée pour empaqueter des centaines de livres. Pour faire disparaître toute trace de moi. D’autres questions ?

-         Ça ira comme ça. Merci, Karl.

-         C’est moi qui te remercie.

Je débarque le samedi matin, à 8 heures, au pied de la Tour Panoramique. Je n’arrive pas les mains vides, ma voiture est chargée de cartons. Je tombe sur Samia et les gamins qui finissent de boucler leurs valises.

-  Karl n’est pas encore arrivé ? je demande, très gêné.

-    Il va arriver. Le temps qu’il s’arrache de chez sa pute. Nous, on va y aller. On va dans ma famille.

Je donne un coup de main en fermant une valise récalcitrante et en retrouvant le chat de la famille qui s’est planqué dans les toilettes, puis leur souhaite bêtement un bon week-end. Je les vois s’engouffrer dans l’ascenseur ultramoderne et spacieux qui m’a monté jusqu’à leur appartement. Samia me regarde droit dans les yeux, au moment où les portes se referment.

Je me retrouve seul dans l’appartement. Une famille y a explosé, et je ne vois pas de sang sur les murs. Sur ces entrefaites, Karl arrive. Je le trouve moins stressé que la veille. Nous ne sommes que deux pourtant. Pourquoi n’a-t-il pas sollicité d’autres amis ?

-    Ce que nous allons faire… Moi, je trie mes bouquins. Il y en a certains que je souhaite laisser à Samia…

Pour jouer au grand seigneur ou pour l’emmerder ?

-    Ce que tu peux d’ores et déjà faire, c’est mettre tous les livres en allemand directement dans les cartons.

Et les Zweig, Hesse et autres Goethe traduits en français que je trouve, que dois-je en faire ? Dans le doute, je les laisse sur leurs étagères. Je verrai plus tard, quand de nouvelles consignes me seront données.

Je monte quelques cartons supplémentaires et m’épile l’avant-bras gauche à l’aide du scotch de déménageur. Tout en grimaçant, je me souviens des épisodes qui ont jalonné ma sortie de taule, et de leur effroyable banalité. La pochette de plastique contenant quelques effets personnels que l’on m’a rendue. Karl m’attendant à l’extérieur, dans une voiture blanche.

-    J’ai oublié de te dire… Ma littérature boche chérie, même traduite en bon français de chez nous, tu la mets directement dans les cartons.

-  O.K, Karl.

Je maltraite sans le vouloir un tome de “ La montagne magique ”  et repense à cette balade familiale. La femme et les enfants que j’ai croisés tout à l’heure, je les revois courir devant moi, tandis que Karl marchait à mes côtés pour me dire “ C’est bon, maintenant tu peux recommencer à respirer ”.

L’interphone fait des siennes.

-    Laisse sonner, me dit Karl, occupé à manier le feutre sur une colonne de cartons.

-  Tu es sûr que ce n’est pas de la main d’œuvre supplémentaire ?

-    Je pense pas. Je pense que c’est Samia qui vient nous emmerder. Qui vient m’emmerder.

-  Elle a les clés. Pourquoi elle sonnerait ?

-  Laisse sonner, je t’ai dit.

L’interphone est devenu muet. Nous avons à peine entamé la bibliothèque, et je commence à craindre que nous manquions de cartons.

Après la littérature allemande, il y a la tchèque à sortir des étagères, puis la grecque, puis l’américaine. Avec celle-ci, je retrouve mes repères, tous ces auteurs que Karl m’a conseillés quand j’étais à l’ombre. Je menace Karl pour détendre l’atmosphère :

-  Fais gaffe à ce que je ne t’en pique pas.

-    Je suis bien placé pour connaître tes goûts. Je sais quels bouquins surveiller.

Perché sur un escabeau, je peux voir la calvitie naissante de Karl ainsi qu’une partie du balcon jouxtant son appartement. Je me rappelle ce taulard qui a planqué le cadavre de sa femme une semaine durant sur son balcon. Mais Samia est bien vivante, nous nous sommes croisés tout à l’heure… 

L’interphone sonne à nouveau. Je chute exprès au sol pour me diriger vers lui.

-  Laisse !

-  … C’est toi qui décroches, Karl ?

-    Non, je décroche pas. C’est chez moi, c’est encore chez moi pour quelques heures, et je décroche pas, o.k ?

-    Tu tiens à ce que l’on ne soit que deux à se taper toute la besogne ?

-    Je compte sur toi, aujourd’hui. Et pas qu’aujourd’hui. J’aurai un autre service à te demander… mais pas maintenant.

Il semble avoir l’intention de me le demander quand les cartons m’auront un peu plus crevé, quand je ne serai plus en état de refuser quoi que ce soit. J’imagine le genre de service que l’on demande à un ami qui a tâté de la taule. Et je sais que je répondrai “ oui ” à Karl, parce qu’on ne refuse pas un coup de main à un mec qui vous a apporté Brautigan, Fante et Hemingway en prison.

06/07/2007

Fantaisie urbaine (1)

ICÔNES X-ROUSSIENNES

Au cœur de la Vogue, je discute de l’Islam avec Gnafr’, un ami. Je me dispute avec lui. J’en lâche la peluche Pinkie qui m’encombrait les bras, le Churros qui me pendait des lèvres. J’essaye de me faire entendre, malgré le vacarme des manèges. Je hurle « Je ne veux pas jeter le bébé avec l’eau du bain ! », puis c’est au tour d’un forain de me hurler qu’il n’est pas sourd.

La pluie commence à tomber. Des housses jaunes apparaissent sur les manèges, semblables à des cirés bretons que les mômes auraient abandonnés sur les chevaux de bois, les motos vrombissantes et les éléphants roses. Une fillette pleure en voyant les gouttes trouer sa barbapapa. 

L’histoire ne s’arrête pas là. Mon amitié avec Gnafr’ non plus. Je lui offre une jolie phrase de Cioran (« Connaître, au milieu d’une foire, des sensations dont auraient été jaloux les Pères du désert » ), et nous traversons tout le plateau jusqu’à chez moi. Nous passons rue Bonnet, devant l’immeuble du 26, là où la Vierge est apparue au XIXe siècle.

Aujourd’hui, on y trouve les cabinets d’un orthophoniste et d’une psychomotricienne ainsi qu’un appartement aux fenêtres ouvertes d’où s’échappe du jazz jour et nuit, été comme hiver.

-         Tu te rends compte que notre quartier, notre ville a failli devenir un Lourdes bis ! Il s’en est fallu de peu…

Gnafr’ n’a pas la moindre idée du phénomène que j’évoque, même s’il a lu mon polar censé se dérouler à Lourdes.

-         Lourdes, en fréquentation annuelle, c’est plus important que Bénarès ou la Mecque. Est-ce que tu te représentes l’ampleur du truc ?

-         Et pourquoi le plateau de la Croix-Rousse n’a pas viré Lourdes # 2 ?

-         Une décision de l’Église, qui aurait trouvé ça trop lourd à gérer.

-         Et pourtant, la Vierge Marie est apparue ici ?

-         Bien sûr que oui. Tout ça est historique.

-         Je sais ce que tu regrettes… Le plateau transformé en gros méchant Lourdes, ça aurait empêché l’arrivée des bobos, c’est ça ?

-         Pas les effets collatéraux qui m’intéressent. J’essaye juste de lui trouver un visage à cette Vierge lyonnaise.

-         Et ?

-         J’ai trouvé. Christine Pascal. L’actrice. La réalisatrice. Avec son visage de madone croix-roussienne. Elle a passé son adolescence dans le quartier, Gnafr’. Entre le lycée Saint-Ex et Saint-Bruno des Chartreux.

-         O.K, elle était canon, c’est pas pour ça que Benoît XVI va la canoniser.

-         Qui sait ? On peut toujours se fendre d’une lettre à Barbarin. En s’y mettant à deux…

F.Houdaer (publié dans « Lyon-Capitale # 547 )

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25/01/2007

VISITE À L’APPARTEMENT

je lui fais faire

le tour du propriétaire

elle me suit

en toute confiance

la mosaïque du sol

mille et un morceaux

de peaux

je me penche

pour lui montrer

ces peaux que j’ai aimé

caresser

lécher

mordre

elle sait

qu’ici

on donne ce que l’on veut

elle sait

qu’avec moi

il y a un prix à payer

mais qu’il est libre

cette seule condition

suffirait à donner le vertige

à n’importe qui

elle tombe

évanouie

je passe

à l’étape suivante

20:50 Publié dans a.2) MES TEXTES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, peau

23/01/2007

ROUSSE

la femme se confie au docteur

elle le fait en anglais

      je comprends que tout

      ne tourne pas rond

      dans sa vie sexuelle

      le docteur la trousse aussi sec

      l’examine

      s’exclame

      AMAZING

      AMAZING

     elle s’étonne

     il s’étonne

     nous nous étonnons

        mes amis et moi

       face à l’écran de télé

       le doc est formel

      déclare à la femme

    qu’elle n’a pas de clitoris

      elle a beau écarter les jambes

    tant et plus

      le doc ne revient pas

    sur son verdict

      il poursuit l’auscultation

    de sa patiente

      examine sa gorge

      bingo

      le clitoris est là

      caché au fond

   de sa gorge

      moi

      c’est au fond

   de mon magnétoscope

      que j’ai découvert les années 70

 

22/01/2007

Lundi 22 janvier

je la vois

grimper

dans un bus qui ressemble

à un vaisseau spatial

je la vois

faire poinçonner

son A.D.N

je la vois

disparaître

au milieu des passagers qui sont autant

d’extraterrestres

je suis le seul

être

humain

qu’elle connaît

je le lui crie

en vain

j’essaye de l’écrire

sur une vitre du bus

j’ai le bout des doigts gelé

quand l’engin quitte la station

il ne me reste plus qu’à créer une secte

certains ne se sont pas gênés de le faire

avec moitié moins de visions

moitié moins de blessures

21:00 Publié dans a.2) MES TEXTES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie

18/01/2007

NE MÊME PAS ÊTRE CERTAIN DE LA CHUTE

 
balcon lumière

sur le point de se décrocher

il tient à un clin d’œil

qu’elle me lancera

qu’elle ne me lancera pas

peut-être me l’a-t-elle déjà lancé

peut-être l’ai-je raté

je n’ai rien appris

concernant la loi de la pesanteur

ou j’ai tout oublié

je ne vois pas venir

le choc

il me faudrait des yeux

plus que des yeux

pour cela

21:25 Publié dans a.2) MES TEXTES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie

06/01/2007

NOUS Y SOMMES

rituel informatique

double-cliquer

sur l’ICÔNE AVEC RACCOURCI

comme une double prosternation

incliner sa flèche

la poser sur la BARRE DES TÂCHES

mon ordinateur fait de plus en plus

de bruit

pas mes livres