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04/05/2022

"La loi"

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Détail cocasse : dans le roman, il est question de la Sophia Loren et de la Lollobrigida comme de deux références incontournables pour les femmes italiennes de l'époque... Dans l'adaptation au cinéma (réalisée par Jules Dassin), c'est la Lollobrigida qui tient le rôle principal ! Pas vu ce film (Vailland l'a renié), mais le roman, quelle claque (surtout les quarante dernières pages).

 

15/04/2022

"Quelques années plus tôt..."

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... j’avais eu la chance de rencontrer René Char (…).
Au quotidien, le poète ne correspondait pas vraiment à l’image d’esthète raffiné que ses écrits suggéraient. Colosse bourru, il appréciait peu les intellectuels. Le seul quotidien qui trouvait grâce à ses yeux, c’était L’Equipe. D’ailleurs, s’il m’avait trouvé sympathique, c’était grâce à mon passé sportif et aussi à cause de mes connaissances assez pointues sur le cinéma d’action, en particulier sur le western.
Au cours de nos promenades autour de l’Isle-sur-la-Sorgue, il m’avait révélé qu’il avait tourné avant la guerre un film comme metteur en scène. Ce que j’ignorais complètement. Il avait voulu faire un western français, à la grande déception de ses mécènes qui visaient plus l’héritage du Sang d’un poète que celui de La Poursuite infernale. L’expérience avait tourné court. Le film n’était jamais sorti, et il en gardait un souvenir un peu amer. 
 
Yves Boisset
 
 

19/01/2022

Hugh Mac Diarmid (Sous le Sceau du Tabellion)

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VENTRE VIDE
 
J'ai rencontré au-delà du cairn
Une fille tout en cheveux
Qu'a chanté jusqu'à ce que sorte
Un loupiot et allez ouste.
 
Les vents qui ont des mondes à moudre
N'ont pas de notes si douces,
La lumière penchée sur une 'tite chose
Est moins vite emportée. 
 
Hugh Mac Diarmid, poète écossais
(Traduction - exceptionnelle - du scots et de l'anglais par Patrick Reumaux),
 

26/12/2021

"avant chaque électiion..."

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Auparavant, avant chaque élection, je faisais circuler la rumeur selon laquelle j’étais opposé à ceci et à cela – les combats de coqs, les jeux d’argent, le wiskey et ainsi de suite. Par conséquent, les autres candidats s’imaginaient qu’ils feraient bien de s’y opposer aussi, mais en se montrant deux fois plus virulents que moi – et je les laissais dire. C’est à la portée de n’importe qui, pratiquement, de faire des discours meilleurs que les miens, et de plaider avec plus de conviction que moi pour ou contre telle ou telle cause. Car moi, je n’ai pas de convictions bien solides sur quoi que ce soit. Ou du moins, je n’en ai plus.
Moyennant quoi, lorsque le scrutin approchait, les électeurs avaient le sentiment que c’en serait fini de la rigolade si mes adversaires étaient élus. Le citoyen de base, tout ce qu’il aurait encore le droit de faire sans finir en taule, ce serait boire de la limonade et embrasser sa femme. Et c’est une perspective qui n’enchantait personne – même pas les épouses.
Alors, tout bien pesé, je commençais à passer pour un candidat plutôt valable aux yeux des électeurs. C’est le genre de situation où « rien du tout » semble préférable à « quelque chose », parce qu’il suffisait aux électeurs de me regarder et de m’écouter un moment pour comprendre que je n’étais pratiquement opposé à rien, sinon au fait de ne plus toucher ma paye, et que je n’aurais jamais le cran nécessaire pour faire quoi que ce soit, même si j’y tenais fermement. Je laisserais simplement les affaires suivre leur cours comme elles l’ont toujours fait, parce que ça n'aurait pas de sens de tenter de les changer. Et après le dépouillement des bulletins de vote, j’étais toujours shérif. »
 
Pottsville, 1280 habitants de Jim Thompson
Trad. Jean-Paul Gratias
(la couv' italienne, c'est par snobisme)
 

24/12/2021

"c'est grand comment, en fait ?"

- Pottsville, c’est grand comment, en fait ?
- Eh ben, juste à l’entrée de la ville, y a un panneau qui dit « Population : 1280 », alors il me semble qu’il faut pas chercher plus loin. Douze cent quatre-vingts âmes.
- Douze cent quatre-vingts âmes, hein ? Et ces âmes, on suppose qu’y a des gens pour aller avec ?
 
Trad. Jean-Paul Gratias

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02/12/2021

Du...

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Sa vie tout entière fut une influence, c’est-à-dire ce qui ne peut guère se raconter. On la sent tout le temps qu’elle dure, et quand elle n’est plus, on en peut signaler les résultats (…). On retrouve Herculanum sous la cendre ; mais quelques années sur les mœurs d’une société l’ensevelissent mieux que toute la poussière des volcans. Les Mémoires, histoire de ces mœurs, ne sont eux-mêmes que des à-peu-près. On ne retrouvera donc pas, comme il le faudrait, détaillée et nette, sinon vivante, la société anglaise du temps de Brummell. On ne suivra donc jamais, dans son ondoyante étendue et sa portée, l’action de Brummell sur ses contemporains. Le mot de Byron, qui disait aimer mieux être Brummell que l’empereur Napoléon, paraîtra toujours une affectation ridicule ou une ironie. Le vrai sens d’un pareil mot est perdu. 

 

26/08/2021

"bougnats et mastroquets..."

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En marge de Saint-Germain-des-Prés, il reste des bistrots ignorés du public interlope et qui ont chacun plus d’intérêt à mes yeux que les autres réunis. Ainsi tous les bougnats et mastroquets de la rue des Canettes qui vivent très loin du monde snobinard dit littéraire ou de celui pétrifié dit religieux qui les encadrent, et ne sont fréquentés que par les petits rentiers, commerçants, ouvriers, vieux et vieilles prêts pour l’hosto qui crèchent les uns sur les autres dans les maisons ventrues, et sous les toits mansardés de la rue Guisarde, population bistrotière dont les conversations ne dépassent pas la météorologie, la politique à petite semaine, les affres de la nourriture quotidienne, les derniers ragots pas bien méchants sur le voisin et les distractions s’arrêtent au domino, à la belote, au nain jaune, à la manille, et les consommations ne vont pas au-delà de trois verres. J’ai couché plus qu’habité, dans le plus discret hôtel de la rue, chez le père Jules, et l’étrange tranquillité, faite de silence respecté, de fatigue accumulée, d’obscurité économique, m’en semblait d’autant miraculeuse, qu’à moins de dix mètres le tabac du coin faisait un raffut de tous les diables, mais qui ne parvenait pourtant pas à faire le tour de la boulangerie jusque-là. Et son immense salle commune est encore le paradis du scribouilleur qui cherche un havre de paix pour pondre ses pages d’écriture, sans qu’il soit besoin de renouveler une consommation prise la matin et dont la tasse refroidit jusqu’au soir. 


PARIS INSOLITE de Jean-Paul Clébert, éd. Attila

« Le livre le plus étonnant, le plus vivant, le plus Mystères de Paris qui soit éclos depuis les vagabondages d’un Gérard de Nerval. »
René Fallet, Le Canard enchaîné, 08 10 1952

« Une purée déconcertante et féérique »
Kléber Haedens, Paris Presse, 21 10 52

« Un récit de voyage où tout est vrai, même la légende. Et qu’importe ? »
Georges Arnaud, Arts, 29 11 52

24/08/2021

UNE TERRA INCOGNITA ETRANGEMENT FAMILIERE

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Longtemps avant « Jusqu'où la ville », Fabienne Swiatly a publié son premier roman.

Dès le début, « on ne voit pas si c’est une femme ou encore une enfant, celle qui se tient debout au milieu des ruines ». Ce qui est certain, c’est que l’anti-héroïne de Swiatly s’affaire. Pas n’importe comment, pas n’importe où, pas n’importe quand. Elle cherche du charbon en plein Berlin année zéro. Pas un décor déjà vu pour Swiatly, mais un épicentre invivable qu’elle sait nous faire redécouvrir, ressentir, sans misérabilisme. L’écriture de Swiatly n’a rien perdu de sa précision (qui a peu à voir avec l’objectivité, et permet au roman d’échapper aux chausse-trappes du naturalisme).

La femme allemande se tient debout au milieu des ombres qui habitent « sous terre même si les bombes ne tombent plus ». Sachant pertinemment que « la guerre dure plus longtemps que les accords sur papier », que les soldats vainqueurs qui défilent représentent un danger. Elle va suivre (choisir ?) l’un d’eux, pourtant.

D’une langue l’autre, la voilà qui passe par la case « Lorraine ». Elle y passe et s’y arrête. Pour toujours. La transition n’en était pas une. Encalminée dans un quotidien marqué par les enfants, les 3 /8 du mari à l’usine (longtemps qu’il n’est plus le beau soldat à l’uniforme à la taille cintrée), les regards des beaux-parents sur l’étrangère…

Mais là encore, nul manichéisme chez Swiatly. Le mari n’a rien d’un salaud, les femmes entre elles se convainquent volontiers que le malheur est contagieux. Pour finir ? Pour finir, « la femme allemande mourra en pays étranger ».

 

Frédérick Houdaer

 

Une femme allemande

de Fabienne Swiatly

éditions La fosse aux ours

120 pages, 16 €

ISBN 978 2 912042 98 9

21/08/2021

" les seules histoires... "

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(…) les seules histoires qui m’intéressent vraiment sont celles dont je suis sûr, dès le début, qu’elles ne sont jamais arrivées, qu’elles n’arriveront jamais, qu’elles ne peuvent pas arriver. J’estime qu’une histoire impossible, du seul fait qu’elle n’a pas, pour se justifier d’être, une quelconque prétention documentaire ou idéologique, a toutes les chances de contenir beaucoup plus de vérité profonde qu’une histoire simplement plausible. En quoi je suis peut-être – je dis ça pour me consoler – plus réaliste à ma manière que tous ces gens qui croient aimer la vérité, et qui passent leur vie à se laisser bêtement imposer des mensonges insipides – vraisemblables justement dans la mesure où ils sont insipides ! 


Extrait de la préface des Contes de la rue Broca de Pierre Gripari