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17/10/2024

Ma préface au dernier recueil de Benoit Jeantet

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Benoit Jeantet essaie de raconter des histoires. Au moins une, une à la fois, même s’il la sait « périssable », « à consommer sur place », « animée d’aucun dessein ».
Et parfois, souvent, il se plante. Magistralement. Comme personne d’autre. Et ses échecs résonnent longtemps dans le cœur de ses lecteurs. Parce que c’est bien là précisément, de ses « loupés », que naît le chant de Benoit Jeantet. Son chant, oui. Son ode.
Tout à ses efforts « d’échouer mieux » (la formule de Beckett lui va comme un gant), Jeantet se sait vivre dans un pays où l’on assomme et isole volontiers le barde pour ne pas le voir à la table du buffet commun. En Hexagonie, Assurancetourix est moqué. Ainsi que l’a longtemps été la poésie narrative.
Jeantet est poète. Et il aime raconter « malgré » ou « en dépit de »…
Rien qu’un cirque de puces. Comme pour tout bon recueil, on pourrait presque s’arrêter au titre. Rien qu’un cirque de puces… et cela suffit. Parce qu’au fond, de quoi Jeantet, de quoi avons-nous tous besoin pour esquisser une histoire ? De quoi avions-nous besoin dans le monde d’avant le monde d’avant ? Pas de grand-chose : de moulins à vent pour commencer. Jeantet connaît les siens par cœur, plus Quichotte que bien d’autres. Champion de l’impuissance féconde. Autrement, que reste-t-il à faire ? « Tamiser son petit filon » ? « Rêver d’une rupture entièrement tournée en décors naturels » ?
A une époque où tant d’auteurs se soucient de voir leur recueil transposé en série Netflix avant d’avoir fini de l’écrire, on pourra sourire en dessinant l’arc transformationnel des personnages de Jeantet tout au long de ses micro-histoires, redoubler de pédanterie avec le jargon du creative writing… on ne parviendra certainement pas à saisir l’art de l’auteur.
À une autre époque, les textes de Jeantet auraient trouvé asile dans des revues telles que La Parisienne ou Arts. Nous sommes en 2024. Nimier, Laurent, Blondin et toute leur divine clique sont morts et enterrés et écartés. L’université a fait son sale boulot.
Jeantet est là. Il passe à travers les gouttes. Il vit, il aime et il écrit (un autre a fait graver ces mots sur sa propre tombe, et en italien s’il vous plaît). Jeantet se trompe-t-il d’époque ? Si c’est le cas, c’est pour notre plus grand bonheur.
 
Frédérick Houdaer
Rien qu’un cirque de puces de Benoit Jeantet, Editions du Volcan
 

14/07/2024

14 juillet 2024

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on tire sur Trump
je lis Le roi des Aulnes
ma chatte Ulya n’en finit pas de grandir
le pire n’est pas toujours sûr mais
il a rarement paru aussi probable
et Ulya s’en fout
et grandit
un jour je lui parlerai de Bébert

 

09/07/2024

"FOND VERT" (extrait)

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la région est fameuse
pour son vignoble et ses forêts
ses coopératives et ses scieries
pourtant
depuis mon emménagement
je n’ai bu que de la bière belge
et j’ai fait poser
au cœur de la maison
un escalier
en bois exotique 
 
"FOND VERT" (Editions Le Feu Sacré)
 
Le commander : ICI.
 

07/05/2024

"Apostrophes"

 apostrophe,poésie,télé

À QUOI SERVENT LES POÈTES

les gens de ma génération
et ceux plus vieux
se rappellent Apostrophes
la plus fameuse émission littéraire diffusée à la télé française
en une quinzaine d’année
deux Apostrophes seulement
ont été consacrés
intégralement consacrées
à la poésie
ces émissions ont été programmées à chaque fois
dans l’entre-trou
dans l’entre-deux-tours des élections présidentielles
l’animateur l’a avoué longtemps après
il ne voulait pas inviter des romanciers célèbres
qui auraient pu prendre des positions politiques
et ce faisant auraient risqué de le fragiliser
lui
à son poste
à quelques jours d’une élection si importante
si décisive
pour bien des carrières  

 

30/04/2024

"l'éditeur..."

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l’éditeur publie une anthologie de poètes contemporains
sous le titre Poètes des profondeurs
la table des matières compte une cinquantaine d’auteurs
et ne partage pas un seul nom avec
la liste que je pourrais établir
sous un pareil intitulé
je ne dois aimer que les poètes superficiels
 
(extrait d’un recueil en cours d’élaboration)
 

23/08/2023

Carte postale

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on fait le tour de la famille
de nos deux familles
aux quatre coins de la France
je la présente à Tatie et à Tonton
elle me présente à Tatie et à Tonton
pas les mêmes mais presque
on s’enquille moult alcools
beaucoup de kilomètres
et quelques baignades
la morale de cette histoire à la rentrée ?
je ne m’inquiète pas
la vie fait toujours le boulot
 

18/05/2023

Ce dimanche...

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Ce dimanche 17h, au Périscope, à l'occasion de la Grosse soirée Gros Textes, parmi d'autres poètes, je lirai des extraits de ces deux recueils :

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Entrée gratuite

 

30/04/2023

Un problème avec mon nouveau roman

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- Fred, y'a un problème avec ton nouveau roman...


- Si je t'ai demandé de le lire, alors qu'il n'est pas achevé, c'est bien que j' ai besoin d'un retour, critique si possible.


- Oui, mais non. Les scènes de port sont... très bien. Très bien, tes scènes de port. Mais tes personnages...


- Mes personnages ?


- C est leur façon d'interagir... On a l'impression, à chaque scène, qu'ils lisent dans les pensées des uns et des autres...


- C'est exactement ce qu'ils font, où est le problème ?


- Non, mais... Prends l'histoire d'amour que tu racontes, par exemple. C'est de la télépathie H24.


- Ben, oui. Pourquoi ? C'est pas comme ça que ça se passe ? T'as jamais vécu ça ?


- Là, tu me fous la trouille...

 

19/04/2023

Au crépuscule de la Beat Generation

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Les seules histoires qui vaillent la peine d’être racontées sont celles de rencontres. Elles n’ont pas toujours lieu sur les pentes d’un volcan ou au bord d’un lac, elles se produisent parfois sur un bout de trottoir.
En septembre 87, au croisement de deux rues de la ville de Québec, le jeune auteur français Gilles Farcet tombe sur une légende vivante, “considéré pendant 30 ans comme un danger national par la CIA” : Allen Ginsberg himself, en personne !
Cette rencontre s’avéra féconde au point de nourrir deux ouvrages de Gilles Farcet : un récit (Allen Ginsberg, Poète et Bodhisattva Beat*, et un roman (La joie qui avance chancelante le long de la rue**).
Ce ne sont pas de ces livres dont il sera ici question, mais d’un troisième Au crépuscule de la Beat Generation***, bande dessinée au long cours, véritable trip graphique signé Etienne Appert qui fait littéralement sienne l’expérience de Farcet (si tant est que l’on puisse faire sienne l'expérience d’un autre). De la Beat Generation, il sera question, of course. Pas par cette nostalgie que Dylan comparait purement et simplement à la mort. Ni par une hagiographie de ses fantômes. Peter Orlovsky fait une apparition d’épouvante entre les murs de Ginsberg. Et personne n’oublie la fin pathétique de Kerouac entre sa bouteille et sa mère.
Quand Farcet demande à Allen pourquoi il est devenu (et resté) l’élève de Chögyam Trungpa, maître spirituel tibétain certes génial mais inclassable et mort d'alcoolisme, la réponse fuse : “Pour que tu ne te fasses pas d’idées romantiques à propos du bouddhisme”.
Est-ce ainsi que les hommes vivent ? Que les poètes vieillissent et meurent ?

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Appert, au dessin, n’a peur de rien et saute à pieds joints là où les flammes sont les plus hautes, les vortex les plus puissants, quitte à ce que son trait déborde de la page et qu’explosent les couleurs. Il n’est pas de la génération de Farcet qui n’est pas de la génération d’Allen… et ce qui circule entre ces trois-là est d’une remarquable fluidité et lisibilité. Rarement un trip graphique de chaque instant, de chaque planche (ou presque) aura été aussi sensé, aussi documenté… Il n’est que de voir la visite de l’appartement de Ginsberg que nous offre Appert, véritable plongée dans le quartier général des opérations Beat. Sans crainte d’effaroucher ou de déconcerter les fascinés de la beat generation.

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Si Farcet met ses pas dans ceux d’Allen, ce n’est pas pour “gloser sur la littérature, mais pour glaner des leçons de vie”. Et les voici qui pleuvent, comme aimantées. Ginsberg joue avec une sorte de Playmobil à son effigie (le représentant nu) pour évoquer la candeur, l’honnêteté foncière de sa poésie… Ginsberg, entre téléphone et photocopieuse, se démultipliant pour aider mille et une personnes (car, oui, il y a bien un rapport entre la disponibilité permanente de Ginsberg aux autres et la qualité de sa poésie).

 

Une seconde rencontre va marquer le périple américain de Farcet : celle de Hank, poète sauvage, saint clandestin, bodhisattva de quartier… Au fil de leurs petits déjeuners va se jouer une autre transmission. Hank ne se contente pas de pointer qu’à New-York “les fruits frais sont cent mille fois plus courants qu’un regard frais”, ou que les mots du poète ne sont pas ceux “des profs, des journalistes ou des psys”. Hank arrache les derniers masques, les dernières illusions que pourrait avoir un “petit français” sur la beat generation.

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Le danger pour Appert aurait été de représenter Farcet sous les traits d’un “Tintin au pays du beat”. Il n’en est rien (Moloch et la cruauté de certains destins s’invitent dès les premières planches), d’autant plus qu’Appert ose une ellipse finale où l’on voit Farcet réussir quelque chose dont Tintin est parfaitement incapable : vieillir.
Si les épisodes avec Ginsberg sont passionnants, ils pourraient rester anecdotiques sans l’éclairage intérieur que donnent sur l’esprit beat les rendez-vous avec Hank. Et Appert fait dialoguer ces différentes séquences, les fait résonner entre elles bien au-delà de ses cases… que l’énergie beat fait voler en éclat.
Précisons que cet album n’est pas réservé aux seuls initiés fans de la “bande à Kerouac” mais qu’il saura plonger le lecteur le plus novice dans le torrent du “beat” (qui n’a pas attendu la “Beat Generation” pour commencer à couler).
 
* : Editions Le Relié
** : Editions Maelström
*** : Editions La Boîte à Bulles