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01/02/2015

"L'ANGE GARDIEN" # 1

Une des plus belles défenses de la poésie publiées ces dernières années, vous la trouverez dans ce polar...

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« À l’unité, un Lambda, c’est un citoyen ordinaire qui doit être exécuté. L’Unité ne fournit pas d’explication ou de motif. Juste un ordre par les voies habituelles : la poste restante de la rue Marie-Rose ou un rendez-vous fixé dans un bar. Pas de pourquoi. L’unité a ses raisons. Et puis on vous paie assez bien comme ça pour éviter les questions.  (…) Berthet avait toujours soupçonné que les opérations Lamda, la plupart du temps, étaient un moyen pour l’Unité de s’assurer de la loyauté de ses agents.

C’est comme ça qu’on se retrouvait à étrangler un notaire d’Arpajon avec un fil à couper le beurre après s’être planqué sur le siège arrière de sa berline haut de gamme ou à tirer une balle dans la tête d’une vendeuse qui sortait d’un magasin de fringues du XIXe arrondissement. On avait beau tenter de se rassurer en se disant que le notaire d’Arpajon était un ancien des réseaux Gladio et qu’il savait trop de choses sur les manips anticommunistes de la guerre froide ou que la vendeuse des Buttes-Chaumont avait été à une époque une sympathisante d’un groupe terroriste d’extrême gauche, on n’avait aucune certitude. On pouvait même sérieusement en douter.

En 92, donc, Berthet s’était retrouvé avec un sixième Lambda sur les bras depuis le début de sa carrière à l’Unité. Un médecin généraliste de la banlieue de Rouen. Berthet avait désobéi. Berthet avait pris des risques. (…)

Berthet n’avait pas exécuté sa cible. Pas tout de suite. Berthet l’avait enlevée à la sortie de son cabinet, le soir. Un coup sur la nuque, le corps dans le coffre et puis un appartement dans une tour de la Grand’Mare. Le généraliste s’appelait Patrick Lefèvre, comme tout le monde, et il avait quarante ans. Pratiquement l’âge de Berthet à l’époque. Patrick Lefèvre, contrairement à Berthet, avait une existence terriblement normale. Une jolie femme qu’il ne trompait apparemment pas, deux enfants, un chien, une belle maison à Mont-Saint-Aignan. Pas de dettes de jeu, pas d’engagement politique. Un Lambda pur. Patrick Lefèvre avait été choisi au hasard, dans l’annuaire, ce n’était pas possible autrement.

En l’amenant dans l’appartement presque vide de la Grand’Mare, Berthet avait voulu lui faire cracher le morceau. Sinon Berthet s’était dit qu’il aurait du mal à tuer Patrick Lefèvre. Ou que ça allait le poursuivre. Et Berthet ne voulait pas de culpabilité, surtout pas de culpabilité. (…)

Berthet avait bandé les yeux du généraliste et l’avait attaché sur une chaise. Puis Berthet s’était assis devant lui. Berthet avait attendu qu’il reprenne connaissance en lisant La vie dans les plis qui venait de reparaître en Poésie / Gallimard. C’était la période Henri Michaux de Berthet.

Je crache sur ma vie. Je m’en désolidarise.

Qui ne fait mieux que sa vie ?

« Pourquoi ? Pourquoi vous me dites ça ? » avait demandé Patrick Lefèvre qui sortait du coaltar.

Berthet ne s’était pas rendu compte qu’il avait lu à haute voix. Berthet avait été encore plus déstabilisé quand Patrick Lefèvre avait dit, la voix pâteuse

« C’est du Michaux, non ? La vie dans les plis ? »

Merde alors. Tuer un lecteur de Michaux. Cela devenait de plus en plus dur, cette histoire. Tuer un lecteur de Michaux, non mais. Berthet regardait, bouche ouverte, Patrick Lefèvre qui ne pouvait pas voir Berthet.

« Pourquoi ? » avait demandé Patrick Lefèvre.

Berthet s’était demandé s’il n’aurait pas fait aussi bien, tout de suite, de prendre son Sig-Sauer P220 dans son holster de ceinture, de visser le réducteur de son et de tuer Patrick Lefèvre. On n’en aurait plus parlé. Là, c’était encore plus dur. Un lecteur de Michaux. Quand même. Un lecteur de Michaux, l’Unité croyait qu’il y en avait combien en France ? »

 

 

20/10/2014

Rappelez-moi, déjà... Les indiens gagnent bien à la fin du film, non ?

UN CADEAU.

 

 

09/10/2014

ÉLOGE DU CAPITALISME

ÉLOGE DU CAPITALISME

                                    (à Jérôme Leroy)

 

quand nos filles seront toutes des putes

quand elles vendront toutes leurs petites culottes sales

sur Internet

au plus offrant

cela fera toujours moins de lessive à faire

pour leurs parents

 

 

extrait d'un recueil à paraître aux Editions Les Carnets du Dessert de Lune

07/10/2014

Vrac de vrac # 21

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"Je suis inculpé par les magistrats de Turin pour un crime d’opinion. Je soutiens la résistance contre la ligne Turin-Lyon. J’ai dit que la ligne, qui doit être construite, devait être sabotée. La magistrature de Turin a un bureau spécial pour la répression de ce mouvement. Mille personnes ont été inculpées, ce sont des procès de masse. Il y a un pool de quatre magistrats qui ne font que ça, qui sont les chiens de garde du chantier. Il y aura un procès. Mais la presse italienne se tait."

Erri de Luca (L'ARTICLE)

Sans compter qu'à Lyon, un autre chantier n'en finit pas d'avancer comme un rouleau compresseur (un autre article)...

Deux lectures récentes, qui aident à ne pas ramper :

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Et une chansonnette pour finir...

10/06/2014

Marché de la Poésie, Place Saint-Sulpice, Paris...

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Je serai à Paris du vendredi 13 au mardi 17 juin (Marché de la Poésie, expo "Mousquetaires" aux Invalides, Marche pour la fermeture des abattoirs...) et signerai mes livres place Saint-Sulpice sur le stand de la Passe du Vent (stand n°210) le samedi 14 juin à 17h30.

Mes amis(hs) parigots peuvent me contacter au 06 43 09 15 10

Pour mémoire, ce passionnant reportage que j'ai consacré au Marché de la Poésie l'an dernier... Il m'a valu le Pulitzer, mais je n'ai pas trop voulu la ramener à l'époque.

Autrement ? L'heure n'est pas qu'aux crachats, il y a même des saluts qui font du bien, beaucoup de bien...

 

18/09/2013

PARUTION

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Après ma trilogie des "Anges profanes " (ANGIOMES - ENGELURES - ENGEANCES), j'ouvre un nouveau triptyque poétique en cette rentrée. Et ne vous fiez pas à la quatrième de couv' (volontairement) trompeuse  de ce livre !

Une critique signée Jérôme Leroy  !!!!

Une autre de Patrice Maltaverne.

D'autres encore, écrites par Laurent Cachard, F-X FarinePaola Pigani, D.J DUCLOCK, Jacques Morin (revue Décharge), Jack Chaboud ou Eric Dejaeger.

COMMANDE (papier) chez l'éditeur

COMMANDE (Internet) sur le site DECITRE.FR

 

29/08/2013

Vrac de vrac # 10

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Le 79ème numéro de la revue belge "Microbe" paraît avec, comme rédac-chef exceptionnel, Jean-Jacques Nuel.

Au sommaire : Stéphane Beau
C
hristian Chavassieux
C
hristian Cottet-Emard
R
oland CounardNuel - Modèles réduits.jpg
G
régoire Damon
B
ernard Deglet
C
hristian Degoutte
F
abrice Farre
J
ean-Marc Flahaut
A
lain Helissen
F
rédérick Houdaer
H
ervé Merlot
P
aola Pigani
S
téphane Prat
P
ascal Pratz
M
arlène Tissot

Les illustrations sont de Nicole Vidal-Chich

 

Plus d'infos ? ICI.

 

Autrement ? Je me demande si, quinze années après m'être débarrassé de ma télé, je ne vais pas en faire de même avec ma radio. Avec tous ces bruits de bottes, je n'ai plus qu'à m'équiper chez André Robillard.

 

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Autrement (bis) ? C'est donc pour de vrai, cette rentrée officielle que l'on sonne (au clairon) ? Fini, le cassé bleu ? Bonne rentrée, alors. 

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16/10/2012

Où l'on me tire le portrait...

ICI !

28/01/2012

"LE BLOC" de Jérôme Leroy

 

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« C’était Brou qui conduisait. Il avait une Fiat Polski verte, une vraie caisse à savon, qui n’avait aucune tenue de route. L’habitacle puait le tabac et l’alcool. Tu montas à l’arrière avec Simon. Le CRS était le seul du groupe à avoir une carrure encore plus impressionnante que la tienne.

C’était un garçon mélancolique qui vivait tout le temps à la caserne de Darnétal, contrairement à nombre de ses collègues. Il en devenait populaire car il était toujours prêt à rendre service pour les astreintes du week-end ou des jours fériés.

Simon était persuadé, sincèrement persuadé, que les Soviétiques allaient franchir le Rhin et que Giscard était un agent du KGB, tout comme Mitterrand. La gauche avait perdu les dernières législatives, celles de 78, mais ça ne le rassurait pas. Il souffrait de fait d’une légère paranoïa et passait ses loisirs à lire dans sa chambrée des magazines de cul comme ses collègues : il n’aurait pas voulu qu’on le prenne pour une tafiole. Mais, dès qu’il se retrouvait seul, il se gavait de romans d’espionnage avec une prédilection pour les SAS que lui prêtait Brou. Pour aggraver les choses, Brou lui prêtait aussi des romans de Saint-Loup et de Jean Mabire.

Il te demanda de sa voix douce ce que tu lisais et sans que tu saches au juste ce qui te prit, tu lui lus un extrait d’ « Union libre » :

Ma femme aux jambes de fusée

Aux mouvements d’horlogerie et de désespoir

Ma femme aux mollets de moelle de sureau

Ma femme aux pieds d’initiales

Aux pieds de troupeaux de clés aux pieds de calfats qui boivent

Ma femme au cou d’orge imperlé

Ma femme à la gorge de Val d’or

De rendez-vous dans le lit même du torrent

Aux seins de nuit »

Tu fus presque gêné par sa réaction.

Là, au milieu des clients, du bruit de la rue qui couvraient brièvement les conversations à chaque entrée ou sortie d’un client, les yeux du CRS s’étaient emplis de larmes et il répétait mécaniquement :

- Qu’est-ce que c’est beau, qu’est-ce que c’est beau, qu’est-ce que c’est beau.

Depuis, tu lui prêtais ou lui offrais très régulièrement de la poésie. Après Breton, ce fut Alcools qu’il aima moins, René Char qu’il n’aima pas du tout, Verlaine, Rimbaud, Musset. Inexplicablement, Simon eut une véritable passion pour Michaux dont il ne se lassait pas. Bien qu’il t’ait demandé de garder cette dilection secrète, « ils vont se foutre de ma gueule », et que tu n’aies rien dit, cela finit par se savoir.

Jean Emile fut effondré. Il trouvait de très mauvais aloi que l’homme d’action s’émollie avec des vers.

Brou, lui, fut plus tolérant et indiqua que nous étions là dans une vieille tradition occidentale, celle des guerriers poètes. Il parla de Charles d’Orléans ou de Drieu.

Simon, rassuré, n’eut plus à se cacher mais il était très étrange, tout de même, de l’entendre murmurer comme une prière des extraits de Misérable Miracle, alors que vous incendiez au cocktail Molotov la permanence d’un conseiller général communiste du côté du Petit-Quevilly. »

 

« LE BLOC » de Jérôme Leroy (lien vers le site de l'auteur dans la colonne "Passerelles" à gauche), éd. Gallimard, Série Noire.

Une critique du livre par Thierry Marignac, auteur du récent et tout aussi excellent "MILIEU HOSTILE".

Une autre critique du livre signée Christopher Gérard.

Je vous épargne les papiers parus dans la presse traditionnelle, aussi nombreux qu'insignifiants.