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23/08/2017

HANTISE HIVERNALE ou "pour ne pas oublier Cécile (Philippe)"

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"LE MAGANÉ » de Cécile Philippe

“ Pendant la nuit le fleuve a gelé d’une rive à l’autre... ” Le fleuve dont il est question est le Saint-Laurent. Nous sommes à Montréal. Cécile Philippe, en résidence d’auteur, habite Montréal. Est habitée par un écrivain qui, plus qu’aucun autre, incarne l’esprit et les paradoxes de la littérature québécoise. De la littérature tout court.

La rencontre d’un pays peut être plus importante que celle d’un homme. ” Pour le reste, peut-on parler de rencontre de Cécile Philippe avec Réjean Ducharme (jamais nommé dans ce “ Magané ”), le Salinger francophone, l’homme invisible des lettres québécoises, l’elfe qui permettra un jour au joual d’entrer dans la Pléïade, l’écrivain le plus scandaleusement désengagé de notre temps ? Cécile Philippe déniche-t-elle une seule photo du grand (petit) homme datant de ces dernières années ?

Comme pour compenser la rareté de pareilles images, la voilà qui tapisse ses murs de 414 reproductions du même cliché, la voilà qui corrige le portrait de jeunesse de l’écrivain pour deviner son visage d’aujourd’hui, à l’abord de la soixantaine… des fois qu’elle le croiserait sur un trottoir Montréalais. Encore que six mois par an, les québécois avancent masqués sous leur panoplie d’hiver…

 “ Je vis sous ses yeux qui ne me voient pas (…). Je n’ai plus de miroir. J’essaye de ne pas changer, comme lui. 

Elle rêve, elle l’imagine, elle le dessine, avec ou sans lunettes, malade ou pas malade, elle l’invoque en ponctuant son texte des titres de ses livres… Elle est une idolâtre dont la mauvaise foi brille dans le noir. Elle est une écrivaine (comme on dit au Québec) noircissant des pages sur un autre auteur, se laissant hanter par lui. Elle est un écrivain (comme on dit en France) qui s’inscrit dans l’une des plus belles traditions littéraires qui soit.

 F.Houdaer (article paru en 2003 dans "Livre & Lire", la revue de l' Arald)

 

Le Magané

De Cécile Philippe

Editions Le rocher

76 p., 11 E.

ISBN : 2-26804541-2

 

 

22/11/2010

L’APRÈS « SANG D’ENCRE »

Week-end au salon Sang d’Encre marqué par la présence-absence de l’ami Pascal Garnier.

Précision : je travaille depuis juillet à l'écriture d'un roman qui est dédié à Pascal Garnier (ainsi qu’à Cécile Philippe).

Au salon du polar de Vienne, comme par hasard, le libraire m’installe "à la table de Pascal Garnier", tout à côté d'une photo de lui et des piles de ses livres...

Tout au long de ces deux jours, je vais parler de lui avec des lecteurs (j’apprendrai son décès à certains d’entre eux). Il y en aura même un pour me demander… de lui dédicacer un livre de Pascal Garnier !

Mon autre voisin de tablée s’appelait François Joly. Il m’a raconté une belle anecdote, remontant à quelques années. Joly était dans les locaux de Gallimard, en train de signer les services de presse de sa première Série Noire, quand un vieux monsieur l’a abordé… pour le remercier. Pour lui dire que grâce aux polars et à leur tirage confortable, Gallimard pouvait publier de la poésie. Lui, le vieux Monsieur, poète de son état, avait vendu son dernier titre à 1500 exemplaires (dix fois moins que certains polars).

Le vieux monsieur s’appelait Guillevic.

Pour en finir avec ce week-end, précisons que je me suis procuré un excellent premier roman :

moi comme les chiens.jpg

24/03/2010

Mercredi 24 mars (où je n'invente rien)

Pour commencer, un petit résumé en images de la lecture poétique d'hier soir qui a tenu toutes ses promesses... La salle était (presque) comble, et les retours aussi peu complaisants que positifs.

 

... En préparant ce duel poétique, j'ai relu mon premier recueil et y ai trouvé... de quoi me trouver très mal : deux textes consacrés à des amis auteurs, Pascal GarnierCécile Philippe !

Une annonce pour finir : j'animerai la rencontre entre François Beaune ("Un homme louche", éd.Verticales) et David Boratav ("Murmures à Beyoglu", éd. Gallimard) vendredi 26 mars, à 19h30, à la bibliothèque du 1ier arrondissement de Lyon. Où il sera question de Londres, de Paris, d'Istanbul... et même du Jura (merci F.Beaune) !

08/03/2010

Un cauchemar

garnier.jpg
C'est ça, avoir 40 ans ? Apprendre la mort de deux amis en l'espace de 48 heures ?
Il y a ce que vous lirez dans les articles consacrés à ces auteurs décédés.
Il y a tout ce que vous ne lirez jamais.
Je n'ai rien oublié. Rien oublié de ce que m'a raconté Cécile, par exemple, sur les humiliations qui jalonnent le parcours d'un(e) auteur(e)
A
bon entendeur...
Quelques unes de mes critiques sur les livres de Pascal.
Je vais retrouver mes textes sur Cécile. Laissez-moi le temps de.cécile.jpg

29/03/2005

aux marches du Palais

Avec François Barcelo, nous descendons dans la Drôme jusqu’à la maison-musée (invisible de la route) de Cécile Philippe. Quand je parle de « maison-musée », je n’exagère pas. Dans ce chalet monté comme un Lego (les poutres sont arrivés de Finlande, chacune numérotée pour que l’on sache les emboîter sans vis ni clou dans le bon ordre, sauf que les étiquettes se sont décollées durant le transport), se sont accumulés les œuvres de plasticien achetées par Cécile(1) durant sa carrière de journaliste. Sans compter les artistes qui sont venus ici pour peindre la plupart de ses portes (de Jim Léon à Mignot). 

        Nous parlons littérature, Montréal (Cécile y a également effectué une résidence d’auteur et a pris l’habitude d’y vivre six mois par an), frelons (qui lui posent des problèmes sur son terrain drômois et composent le pire de mes cauchemars d’enfance depuis le jour où j’ai été coursé par tout un essaim, plus « Orphelin de Perdide » que moi, tu meurs !), manuscrits de François (en exclu mondiale, j’ai lu et commenté les deux derniers : « Pompes Funèbres » et « Bossalo »), Calaferte (que Cécile a bien connu), Chantal Pelletier (sa résidence d’auteur à Montréal est plus récente)…

        Avec François, nous allons visiter le Palais Idéal du Facteur Cheval à Hauterives.

        Enfant (j’habitais dans le nord de la France), j’étais un inconditionnel du Facteur. À mes yeux, il était l’artiste idéal. Quand j’ai visité une première fois son Palais, âgé de 15 ans, la désillusion a été rude. Vingt ans plus tard, j’y retourne. Je me surprends à être ému. Quand un autodidacte rencontre un autre autodidacte…

        Cécile nous parle du reportage qu’elle a voulu consacrer au Facteur Cheval il y a quelques années. Bien sûr que de son vivant, tous ses proches l’ont pris pour un cinglé. Cécile nous raconte sa rencontre avec les petites-filles du facteur. Des dizaines d’années après sa mort, alors que la consécration officielle (Malraux et cie) était passée par là, les membres de sa famille n’avaient pas changé de regard sur lui !

        Suite de la visite du Palais du Facteur :

        Ses auto-citations écrites sur les murs de son palais, truffées de fautes d’orthographe (elles ont mystérieusement disparues quand les phrases du facteur sont reproduites dans les brochures touristiques, blasphème !).

 

        « La vie est combats »

 

        « Ce que Dieu écrivit sur ton front’arivera »

 

        Il sait aussi bien faire parler sa femme que sa brouette :

 

        « Je suis fidèle compagne        

du travailleur intelligent        

qui chaque jour dans la campagne        

cherchait son petit contingent »        

« Moi, sa brouette, j’ai eu cet honneur        

d’avoir été 27 ans sa compagne de labeur »        

À l’intérieur du Palais : « J’ai voulu dormir ici ».

 

        J’attire l’attention de François sur cette formule irrésistible que l’on retrouve en plusieurs endroits du palais, et que l’on pourrait faire figurer sur les quatrième de couv’ de nos livres :

 

        « TRAVAIL D’UN SEUL HOMME »

 

        Nous avons beaucoup ri. Et je n’ai pas manqué d’acheter un portrait-carte postale du grand homme. Dire qu’il a commencé son œuvre à 43 ans ! À 70, il la finissait pour s’atteler à son tombeau qu’il acheva à 86 ans, juste avant de mourir).

 

  (1)              par déontologie, Cécile a toujours refusé les cadeaux. Un jour, un peintre qui avait appris indirectement qu’elle aimait son travail, lui a envoyé trois petites œuvres. Elle les lui a renvoyées avec un mot d’explications, je ne peux pas accepter, etc. Le type les lui a renvoyées à son tour, mais pas du tout, vous n’avez pas compris, je ne tiens pas à vous demander quoi que ce soit, mais simplement à, etc. Elle les lui a renvoyées une nouvelle fois avec un mot « si, à l’avenir, vous faites une exposition, soyez certain que je n’en parlerai pas… »