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11/07/2017

La lettre à Helga

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"En qualité de contrôleur des provisions de foin, je suis venu voir si tu étais toujours bien en chair. (...) "

 

14/02/2017

Relire quelqu'un qui manque...

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Un mini-portrait.

 

 

16/05/2010

LE GRAND ÔTEUR

Avoir connu Pascal Garnier, qu'est-ce que cela signifie ? Avoir lu ses livres. Goûté sa cuisine. Touché sa peinture. Avoir rencontré un artiste complet et rempli de failles.

Garnier n'avait rien d'un donneur de leçons (trop bon écrivain pour cela). Reste que chacun de ses amis qui a pu apprécier sa cuisine a forcément fait des parallèles entre l'écriture du bonhomme et sa façon de se mettre aux fourneaux. Pas le genre à charger un plat de trop d'ingrédients. Toujours les justes proportions.

Il aimait à parler du "nécessaire syndrome de Robinson Crusoé". "T'es échoué, t'as plus rien, sinon quoi… un canif, deux coquillages, un bâton et une vieille boite d'allumettes trempée… et c'est avec ça que tu vas faire quelque chose. Pas besoin de plus".

C'est ainsi que ses meilleurs livres ont été écrits avec un vocabulaire de 5000 mots.

Dupe de rien, Garnier. Imperméable aux querelles de chapelles si fréquentes dans le milieu du polar… Un milieu dont il a toujours tenu à se démarquer même si il y comptait de solides amitiés (lui qui avait commencé à publier chez P.O.L avant de passer au Fleuve Noir pour finir chez Zulma, ne cessait d'affirmer qu'il écrivait des "romans, non pas noirs, mais gris").

Il savait appuyer là où cela fait mal. Ou rire parfois. C’est à cela que l’on reconnaît une page de Garnier, à sa façon de nous placer devant cette alternative : doit-on en rire ou en pleurer ?

Héritier de Calet et de Simenon (tout autant que de James Ensor et de Otto Dix), cet auteur prolifique de livres maigres savait camper des personnages riches d’une force proportionnelle à leurs meurtrissures, bien qu'englués dans un quotidien navrant.

Pascal Garnier est mort. On a pas fini de parler de ses livres. Heureux ceux qui vont découvrir son œuvre. Heureux ceux qui vont la relire.

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01/02/2010

Trois "Mortelles randonnées" signées Pascal Garnier

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On peut compter sur l’auteur de « Nul n’est à l’abri du succès » et des « Hauts du bas » pour appuyer là où cela fait mal. Et rire parfois. C’est à cela que l’on reconnaît une page de Garnier, à sa façon de nous placer devant cette alternative : doit-on en rire ou en pleurer ? Doit-on en rire ou en pleurer de ce Bernard Ferrand, 22 ans et deux doigts en moins ? Doit-on en rire ou en pleurer de ce Simon Marechall, tueur à gage vieillissant ? De cette ville thermale, théâtre de leur rencontre, « riche de six sources, la Constantine, la plus vertueuse dans les surcharges pondérales (…), la Précieuse pour les traitements hépatiques, la Dominique très utiles dans les anémies (…), la Désirée, utilisée pour ses vertus laxatives, la Rigolette, prescrite dans les colites, la Camuse à utiliser en cas de paresse digestive. »

Bertrand et Simon. Le vieux tueur à gage embauche le jeune homme comme chauffeur. S’en suit un road-movie provincial dont Garnier a le secret, sorte de Twin Peaks Chabrolien. Très vite, nos deux (anti) héros devront faire avec des passagères clandestines : une jeune mère abandonnée et son bébé. Au bout de la route, il y aura pour le toujours vert Simon Marechall la redécouverte des larmes, et pour le même pas trentenaire Bernard Ferrand la possibilité d’une nouvelle vie malgré un retour à Vals-les-Bains où « il y a toujours le casino, des promenades, le château de Cros, les coulées basaltiques et Jean Ferrat ».

Pascal Garnier ne déroge pas à sa propre règle. Son dernier roman est, comme les précédents, une histoire de « naufragés que le hasard aurait réuni sur une île déserte ».

 

F.Houdaer

 

« Comment va la douleur ? »

de Pascal Garnier

éditions Zulma

192p., 16€

ISBN 2 84304 377 8

 

 

 

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Au commencement, il y a la fin de la guerre. « Été 44. (…) On pourrait croire qu’il ne s’est rien passé ». Les drapeaux « ne sont plus bleu, blanc, rouge mais plutôt mauve, beige et rose fané ». Tout l’art de Pascal Garnier est déjà là, qui dépasse de loin le sens du détail. Des hommes « avec leur fusil de chasse encore plein de paille et leur brassard FFI de la dernière heure » tondent un trio d’amies. Des femmes que Garnier fait se perdre de vue puis se retrouver quarante ans plus tard grâce ou à cause de quelques contretemps. Pas n’importe où : sur l’épicentre de leur humiliation, une bourgade du bord de Cher.

Pour Garnier, aujourd’hui se conjugue au passé simple, et les souvenirs de guerre qui ponctuent le récit au présent. Ce choix n’a rien de gratuit. Une fois ouverte sa « Parenthèse », il sait qu’il lui faudra bien la refermer, et il n’ignore pas que le réalisme de son récit se renforce à chaque coïncidence troublante (par exemple, tous les allemands croisés dans le roman, même à 40 ans de distance, s’appellent Manfred). Héritier de Maupassant et de Simenon, Garnier sait aussi bien croquer certains ruraux dans toute leur cruauté, que camper des personnages féminins riches d’une force proportionnelle à leurs meurtrissures.

« Trois vieilles chouettes sur une branche pourrie. (…) Au fond, toutes ces années passées n’avaient fait qu’une grande boucle pour les ramener à ces trois gamines qui formaient une espèce de bande dans la cour de la récréation. Sûr qu’on devient ce qu’on a été. »

Et quand les animaux se mettent à parler à un personnage qui s’enlise (au sens propre du terme), comment ne pas songer à l’univers sombre et bucolique de « La nuit du chasseur », où la faune la plus glauque offre une sorte de réconfort après que l’humanité ait démontré toute sa saloperie.

Une dernière précision, et d’importance. Le roman se conclut sur la phrase : « Je suis heureux ». Est-ce bon signe ? se demanderont les afficionados de Garnier.

 

F.Houdaer

 

Parenthèse

De Pascal Garnier

Editions Plon

184p., 16 euros

ISBN 2 259 19978 X

 

 

 

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Il faut oser. Il faut oser commencer un roman par la phrase : « Moi aussi, je connais Agen ! ». Pascal Garnier le fait, sans se poser de question. Et son lecteur, en confiance, de le suivre. « On évoque Agen, distraitement, au cours d’un dîner en ville, sans se douter qu’en fait, on l’invoque, et là, c’est autre chose ! » est-il utilement rappelé à la page 143 mais à ce stade là de l’histoire, il est déjà trop tard pour ses personnages, trop tard pour faire marche arrière.

Cela a pourtant (trop ?) bien commencé. Par des retrouvailles père-fille. Certes, le père aime s’accouder à la rambarde d’un pont pour s’abîmer dans la contemplation d’une autoroute. Ou rêver sur le bout du monde même si « le bout du monde devait ressembler à certains petits coins de Bretagne. C’était un peu décevant. » Certes, la fille sort de l’hôpital psy. Tous deux partent, ensemble. Avant que de se perdre tout à fait. Et il existe mille et une façons de se perdre. Surtout dans un roman de Garnier.

Le lecteur a le temps de souffler, de s’arrêter sur des détails savoureux. Le courant d’une rivière « charrie des débris de polystyrène », l’intérieur d’une voiture se caractérise par « un mélange d’odeurs contradictoires, pin, lavande, eau de Javel et maroilles », on trouve un bar « où il fait chaud et jaune comme dans un œuf ». Autant de traces de l’humour si particulier de l’auteur (il y aura bien, un jour, une thèse universitaire sur ce sujet… que l’on pourra titrer « Il vaut mieux en rire qu’en pleurer »).

Le roman est une suite d’étapes dans des villes typiques de l’univers de Garnier. Une station-balnéaire en pleine saison morte, par exemple. L’occasion d’une page d’anthologie sur les cerf-volants, les liens qui relient les choses et les gens. « Un jour, il faudrait bien inventer le ciseau à couper les ficelles, toutes les ficelles, celles qui nous lient étroitement les uns aux autres et abolir du même coup la loi de la pesanteur ».

Autre morceau de bravoure : Garnier nous dépeint l’anatomie de quelques piliers de comptoir pour nous donner à voir un strip-tease digne de l’émission du même nom ainsi que d’une toile de James Ensor.

Mais le meilleur (et le pire) reste à venir. L’escapade familiale va progressivement tourner au road-movie criminel. « Le Grand Loin » s’apparente moins aux précédents « romans gris » de Garnier, qu’à un authentique roman noir. Garnier, plus qu’un grand auteur, est un grand « ôteur », et joue de l’ellipse pour tendre son récit… façon de jouer avec les nerfs de son lecteur. Jusqu’au moment où il ne peut laisser dans l’ombre plus longtemps l’atrocité de certains destins.

 

F.Houdaer

 

« Le Grand Loin »

de Pascal Garnier

Éditions Zulma

162 p.

ISBN 978 2 84304 498 4