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26/01/2008

Qu'est-ce qu'on attend ?

Voici des extraits du texte écrit à quatre mains par Fanny Britt (Elle) et moi-même (Lui) pour le colloque "Hommes, femmes, la révolution inachevée" qui s'est tenu à Lyon début décembre, et qui a fait l'objet d'une lecture-performance:

 

Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ? Qu’est-ce qu’on attend pour faire la fête ?

LUI

J’attends que ce refrain stupide quitte mon cerveau. Le responsable : mon auto-radio. Il ne m’a pas épargné tandis que… j’attendais en bas de chez elle. J’attendais qu’une place se libère pour me garer.

La porte de son immeuble. J’attends de me rappeler le numéro de son digicode. Quand cela me revient, j’entre, j’accède, je pénètre. La retrouve. Trop tôt, selon elle.

J'attends qu'elle soit prête pour que nous décollions.

J'attends qu'elle ait fini de se préparer pour que nous levions le camp.

J'attends qu'elle ait apporté "la dernière touche" à sa beauté qui n'a pas besoin d'être refaite pour...

 

J’attends en relisant deux-trois pages. « Belle du seigneur ». Quand Ariane s’apprête, elle aussi, tandis que Solal… Pour Albert Cohen, cela nécessite une vingtaine de pages. Cela lui demande une vingtaine de pages. Cela mérite une vingtaine de pages.

Je ne m'y attends pas, je ne m'y attends plus quand elle m'annonce que, c'est bon, nous pouvons partir !

 

 

Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ? Qu’est-ce qu’on attend pour faire la fête ?

 

ELLE

J’attends que la douleur cesse.

J’ai le cœur qui me brise à chaque heure, au réveil, sous la douche, dans la nuit, au déjeuner devant la boîte de céréales

Parce qu’il y a quelque chose dans mon ventre que je n'ai ni la solidité ni l'inconscience courageuse et folle de garder là.

Et que je n'ai pas pris de rendez-vous encore, mais que sûrement, sûrement, la semaine prochaine je prendrai le chemin de la clinique et qu'au bout d'une heure tout sera fini et j'irai m'acheter des machins super-absorbants (est-ce qu'il y en a pour le cœur, de ça?)

Et je rentrerai à la maison et j'aurai envie d'une soupe et de pleurer et ensuite ça ira mieux, ensuite ça ira mieux, ensuite ça ira mieux.

Tu vois je n'arrive même pas à dire le mot.

Hier dans un restaurant bruyant et plein de la lumière chaude de nos intérieurs d’hiver j'étais courageuse et souriante et claire.

Le matin c'est plus difficile.

Faire semblant que tout va bien quand je parle à ma mère est difficile.

Tout ça restera discret et chuchoté, il le faut, tu vois, puisque je n'arrive même pas à dire le mot.

Mon amoureux est courageux et patient - plein de respect et d'espace pour moi, plein d'indulgence pour l’humeur et les symptômes pénibles, il est grand et plein d’espoir plein de baume -

Mais je sais ce qu'il voudrait

Et je vois que je ne peux pas le lui donner

Pas tout de suite

Peut-être jamais?

Comment le savoir?

Quand le saurai-je?

Quand la douleur cessera?

Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ? Qu’est-ce qu’on attend pour faire la fête ?

 

LUI

J’attends qu’on cesse de nous prendre pour des cons. Nous-prendre-pour-des-cons.

J’attends que l’on ne nous donne plus du « on ». Surtout quand ce « on » désigne elle et moi.

J’attends que l’on me parle moins systématiquement de « fête ».

Je n’attends pas qu’ils me donnent le goût de la fête. Je ne les juge pas compétents en la matière.

J’attends de voir tomber tous ces pue-la-mort donneurs de leçons de vie

Qu’est-ce qu’on attend pour être…

37. Cette chanson date de 1937. Les gens la reprenaient en cœur, la dansaient. Et la guerre arrivait. Et aujourd’hui, on… elle me reproche de rapporter ce genre de fait, de gâcher l’ambiance…

Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ? Je l’ignore, mais au moins, que cela soit de pied ferme. Cette fois.

 ELLE

J’attends que la douleur cesse.

J’attends que le temps se replie sur lui-même et me ramène au point d’éclatement

Qu’il me ramène à l’épicentre

Au moment où il a dit :

Je suis tombé amoureux.

De quelqu’un d’autre.

 

LUI

Qu’attend-t-elle ? Des excuses ?

Moi, j’attends d’avoir posé un pansement sur sa joue pour m’exécuter. Je n’aurais pas dû la frapper. Avec ce livre. C’est lui le responsable, plus… qu’elle. C’est ce livre qui m’a énervé. « Les hommes viennent de Mars, les femmes de Vénus ». John Gray ne craint pas les titres trop longs.

C’est elle qui n’a pas craint de m’offrir un livre au titre trop long.

J’attends que Mars explose, que Vénus se désintègre. J’attends que John Gray meurt. J’attends de voir la femme de John Gray passer à la télé, j’attends de l’entendre dire tout le mal possible de son mari. Pour pouvoir ricaner devant l’écran : « Je m’y attendais, ça ne m’étonne pas… ». 

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  Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ? Qu’est-ce qu’on attend pour faire la fête ?

 

LUI

J’attends… pour décider si je vais l’attendre ou non.

Je décide de l’attendre, d’attendre qu’elle ait joui pour en faire de même.

J'attends de croire à cette histoire incroyable: je descendrais aussi d'une lignée de femmes. Et il est vrai que, tout bien vérifié, des prénoms féminins apparaissent dans mona rbre généalogique. De jolis prénoms même, parfois.

  

ELLE

J’attends que ça revienne.

Je veux que ça revienne.

J’attends que ça revienne.

(Avoir envie avoir le goût avoir besoin avoir fini d’avoir peur avoir fini de voir les cicatrices les plis les pâleurs j’attends de laver mon corps de toute intransigeance)

Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ? Qu’est-ce qu’on attend pour faire la fête ?

LUI

J’attends… le temps qu’il faut pour que le mot « heureux » disparaisse de sa question.

J’attends qu’elle cesse de se raccrocher à ce genre de branches mortes.

En attendant… je la regarde tomber.

Je suis surpris de découvrir mes bras tendus, devant moi.

J’attends d’avoir oublié sa question pour commencer à y répondre.

ELLE

J’attends qu’il sorte des toilettes.

Il prend un temps interminable

Ininterminable même

« Je lis le journal », il dit

« C’est un moment privilégié », il dit

« Qu’est-ce que ça peut te faire ? » il dit

« Pourquoi c’est jamais correct ? » il dit

Je lui en veux de préférer lire le journal seul là-dedans

Qu’avec moi au lit

Je lui en veux de dire ce que je sais être vrai

J’attends qu’il veuille être un autre

J’attends longtemps

 

Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ? Qu’est-ce qu’on attend pour faire la fête ?
 

LUI

J’attends de trouver des choses méchantes à lui dire.

« J’attends de te voir vieillir plus vite que moi », je lui dis.

"J'attends que ça finisse de saigner en toi.

J'attends que ton sang ait fini son cycle, bouclé sa boucle.

Surtout, je n’attends pas que tu sois heureuse pour reprendre le stylo. La voiture. Les clés. »

 

ELLE

« J’attends que tu sois mou ».

« J’attends que tu te plantes et que tu aies besoin de moi »

« J’attends que tu perdes tous tes cheveux ».

« J’attends que tu arrives enfin là pour te dire : trop tard ».

LUI

J’attends que le feu prenne.

Crois-tu que j’ai apporté tous ces fagots en vain ?

Crois-tu que j’ai fait semblant de serrer tes liens ?

Tu peux bien moquer le bûcher que j’ai dressé, je me suis appliqué à… j’ai soigné son édification, et je l’ai fait sans cesser de penser à toi.

Je n’attends pas de remerciements de ta part, pas plus que de cris au milieu des flammes.

Reconnais seulement que tu n'avais pas la nécessité de m'humilier au Scrabble comme tu l'as fait.

 

ELLE

J’attends que tu viennes te coucher.

Les nouvelles vont finir

Tu vas fermer la télé

Tu vas éteindre les lumières

(« tu n’éteins jamais les lumières, dis-tu souvent)

Tu vas barrer la porte

Tu vas faire pipi

Tu vas vérifier que le petit dort bien

Je vais t’entendre poser les gestes de notre vie

Dans les sons de notre maison

Je vais entendre ton amour couler dans la champelure de la salle de bain

Je vais entendre ton amour craquer dans les lattes du plancher

Je vais entendre ton amour tourner dans la serrure de la porte d’entrée

Tu viens te coucher

Je ne t’attends plus

Je t’entends.

(...)

© Fanny Britt & Frédérick Houdaer

21:35 Publié dans a.2) MES TEXTES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : britt, couple

28/11/2007

Semaine chargée

Le mardi 4 décembre, dans le cadre du colloque « Hommes et femmes : la révolution inachevée » (Théâtre de l’E.N.S) : mise en lecture d’un travail de coécriture transatlantique : Fanny Britt, dramaturge québécoise et Frédérick Houdaer écrivain français.

 

Voilà. C’est l’énoncé officiel. Trois lectures différentes, d’une demi-heure chacune, pour ponctuer la journée. Fanny n’ayant pu être présente ce mardi, ses textes seront lus par la comédienne Christine Bellier.

Ceux qui me suivent en Rhône-Alpes savent que, pour la scène, j’écris exclusivement sur ce thème (« elle & lui » pour résumer, du « Strinberg soft » comme je l’ai affirmé parfois en riant tout seul). Pour ce colloque, je ne suis pas allé puiser dans mes fonds de tiroir, j’ai écrit de l’inédit… je le dois pour une large part à Fanny Britt. Écrire à quatre mains, l’expérience me tentait… elle ne m’a déçu.

Bientôt, sur ce blog, les textes écrits pour l’occasion.

 

 

Le lundi 3 décembre, dans le cadre du même colloque, reprise de mon spectacle "Empty" mis en scène par Carine Pauchon (Compagnie In Time).

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Le dimanche 9 décembre, au Musée d'Art Moderne de Saint-Etienne, première mooondiale du spectacle "Exhibition(s)" écrit par mes soins et mis en scène par Carine Pauchon. Plusieurs représentations sont prévues jusqu'en mai de l'année prochaine.

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01/09/2007

RENTREE...

… et sortie d’un été compliqué (les initiés comprendront).

Sur le feu, plein de choses dont un roman en cours de rédaction (toujours), et deux commandes de textes :

L’un avec la Compagnie In Time pour le Musée d’Art Contemporain de Saint-Étienne

L’autre, écrit à quatre mains avec Fanny Britt, pour le colloque « Hommes et femmes : la révolution inachevée » dans le cadre des 20ème entretiens du Centre Jacques Cartier (rencontres franco-québécoises).

 

Dans ma pile de lectures en cours, la biographie de Topor récemment sortie. Je savais que sa famille avait failli être déportée, j’ignorais qu’il avait échappé de justesse à une rafle À LYON MÊME.

J’ignorais également que c’était Jacques Sternberg qui lui avait donné sa chance, un peu plus tard (Sternberg que j’ai lu cet été sur la plage grâce au « Cœur froid » que Eric m’a envoyé).

A signaler: Frantz Vaillant, l'auteur de "Topor ou le rire étranglé", a développé un blog autour du grand Roland. Travail exemplaire.