01/05/2020
Parce que c'était lui...
Qui est Romain Colomb ? Un lyonnais fonctionnaire des Impôts qui, sans jamais se prétendre historien, nous a laissé de précieux écrits consacrés à son cousin : Henri Beyle dit « Stendhal ».
« Un jour, quelque écrivain de talent s’occupera de Beyle ; j’aurais mis les matériaux sous ses yeux (…). Mon ambition se bornera à avoir été pour lui un chroniqueur sincère. »
L’homme nous narre l’enfance de celui dont il a été « le premier ami », à commencer par leurs attentats de jeunesse (tirer au pistolet sur un « arbre de la Fraternité »). Devenu l’exécuteur testamentaire de Stendhal, Colomb fera graver sur son monument funéraire la mention « Milanais », l’écrivain ayant « abdiqué sa qualité de français » dès 1840 pour quelques obscures raisons politiques.
Toute une vie… Que Beyle batte la campagne (d’Italie, de Russie) ou le pavé parisien, son cousin est toujours là pour nous le montrer en train d’accumuler le matériau indispensable à sa future œuvre… mais pas seulement. Le Stendhal qu’il nous dépeint aime aussi à « défigurer son nom, en y ajoutant quelque lettre », à « s’attribuer un titre ou une profession supposés », à passer pour une « fashion victim » à juste titre ou pour un « hypocrite méchant » sans jamais l’être réellement. Oui, Stendhal voit s’évanouir sa fortune en même temps que celle de Napoléon, et il prend « gaiement la chose », oui, il survit en signant des articles littéraires pour des magazines anglais, oui, il rédige une statistique du Sacré Collège afin d’aider Charles X à faire élire un pape français, oui, il ne voit absolument pas venir certains bouleversements politiques majeurs, oui, il lui arrive de « hurler avec les loups » aux dires même de son cousin, et cela ne l’empêche pas de se juger sévèrement dans le même temps (on songe à Drieu), « au fond, cher lecteur, je ne sais pas ce que je suis ; bon, méchant, spirituel, sot. Ce que je sais parfaitement, ce sont les choses qui me font peine ou plaisir, que je désire ou que je hais. », oui, Stendhal reçoit plus de ses amis qu’il ne leur donne, bien qu’il rende « le bâillement impossible dans le salon où il se trouve », oui, il enchaîne les séjours italiens et s’aperçoit… qu’il va avoir cinquante ans, oui, il rêve de recevoir la croix de la légion d’honneur en qualité « d’administrateur » et s’avoue blessé de la décrocher comme écrivain…
Oui, Romain Colomb aime son cousin, et il est conscient de sa valeur, mais jamais il ne sombre dans l’hagiographie. Oui, d’une certaine façon, Colomb n’a pas démérité de Stendhal.
F.Houdaer
« Notice sur la vie et les ouvrages de Henri Beyle dit Stendhal rédigée en 1854 par son cousin Romain Colomb »
(introd. de Gérard Guégan)
Éditions À Rebours
170p., 17 euros
ISBN : 2 915114 03 X
07:03 Publié dans C.A.P de lettres, où je lis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : stendhal, lyon, drieu la rochelle, napoléon, beyle, a rebours, guégan