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02/01/2016

Dimanche 10 janvier...

Cela faisait longtemps...

Pour des tas de (bonnes) raisons, quand je fais des lectures poétiques dans ma (bonne) ville (de Lyon), celles-ci sont le plus souvent de courte durée. Soit que j'intervienne avec d'autres membres du Syndicat des Poètes qui Vont Mourir un Jour, soit...

C'est lorsque je suis invité dans d'autres villes que je dispose de plus de temps pour partager mes textes... faire passer quelques nuances (non, tous mes poèmes ne sont pas drôles, et oui, j'ai quelques recueils inédits sous le coude).

Ce dimanche 10 janvier, à la Croix-Rousse, l'occasion m'est offerte de retrouver un public lyonnais... dans un temps beaucoup plus long.

Cela se passe aux Sarrazineurs, 46 rue de Cuire, sur le plateau de la Croix-Rousse, le dimanche 10 janvier, à 17 h 30 pétantes.

Toutes les précisions, ICI. Attention, réservation obligatoire par courriel : crefadlyon@gmail.com

Il n'y aura pas de places pour tout le monde (la jauge n'est pas celle du Périscope !)

Au plaisir de vous y retrouver... pour devenir plus réels.

 

01/01/2016

Tout ça, tout ça...

 

Je hais le nouvel an, par Antonio Gramsci.

Chaque matin, à me réveiller encore sous la voûte céleste, je sens que c’est pour moi la nouvelle année. C’est pourquoi je hais ces nouvel an à échéance fixe qui font de la vie et de l’esprit humain une entreprise commerciale avec ses entrées et sorties en bonne et due forme, son bilan et son budget pour l’exercice à venir. Ils font perdre le sens de la continuité de la vie et de l’esprit. On finit par croire sérieusement que d’une année à l’autre existe une solution de continuité et que commence une nouvelle histoire, on fait des résolutions et l’on regrette ses erreurs etc. etc. C’est un travers des dates en général. On dit que la chronologie est l’ossature de l’Histoire; on peut l’admettre. Mais il faut admettre aussi qu’il y a quatre ou cinq dates fondamentales que toute personne bien élevée conserve fichée dans un coin de son cerveau et qui ont joué de vilains tours à l’Histoire. Elles aussi sont des nouvel an. Le nouvel an de l’Histoire romaine, ou du Moyen Âge, ou de l’Époque moderne. Et elles sont devenues tellement envahissantes et fossilisantes que nous nous surprenons nous-mêmes à penser quelquefois que la vie en Italie a commencé en 752, et que 1490 ou 1492 sont comme des montagnes que l’humanité a franchies d’un seul coup en se retrouvant dans un nouveau monde, en entrant dans une nouvelle vie. Ainsi la  date devient un obstacle, un parapet qui empêche de voir que l’histoire continue de se dérouler avec la même ligne fondamentale et inchangée, sans arrêts brusques, comme lorsque au cinéma la pellicule se déchire et laisse place à un intervalle de lumière éblouissante. Voilà pourquoi je déteste le nouvel an. Je veux que chaque matin soit pour moi une année nouvelle. Chaque jour je veux faire les comptes avec moi-même, et me renouveler chaque jour. Aucun jour prévu pour le repos. Les pauses je les choisis moi-même, quand je me sens ivre de vie intense et que je veux faire un plongeon dans l’animalité pour en retirer une vigueur nouvelle. Pas de ronds-de-cuir spirituels. Chaque heure de ma vie je la voudrais neuve, fût-ce en la rattachant à celles déjà parcourues. Pas de jour de jubilation aux rimes obligées collectives, à partager avec des étrangers qui ne m’intéressent pas. Parce qu’ont jubilé les grands-parents de nos grands parents etc., nous devrions nous aussi ressentir le besoin de la jubilation. Tout cela est écœurant.

 

(Antonio Gramsci, 1er janvier 1916 sur l’Avanti!, édition de Turin, rubrique « Sotto la Mole ») Traduit par Olivier Favier.