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25/05/2021

Dirk Raspe # 4

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(…) dans la ville, tous les musées m’étaient ouverts ; j’y passais mes heures de congé. Je découvrais avec stupeur la peinture hollandaise. Je n’avais vécu que jusqu’à six ans à La Haye avec ma grand-mère. Certes, cela était resté dans mes yeux. Maintenant, j’étais mis en face du rêve des hollandais, ce qui était plus que leur vie : la lumière, la naissance et la mort de la lumière, la lumière dans ses prisons et faisant de ses prisons des palais, la lumière entre le ciel et la terre, brillant dans l’entrebâillure des nuages et dans une tache soudaine sur une maison, combattue par l’immense conspiration des ciels couverts, des brouillards, des bruines, par les opacités et les louches interceptions ou filtrations, s’éprouvant, s’assouplissant, s’aiguisant dans ces difficultés et en faisant les éléments de son triomphe inattendu, étrange, tour à tour dissimulé et éclatant, unique, irremplaçable, la lumière du Nord.
C’était à peu près la même dont je suivais le destin misérable et émouvant dans la ville. La lumière d’ici n’était pas la lumière de là-bas ; il y a de subtiles mais rigoureuses différences, je n’avais pas les moyens de m’en rendre maître.
Je ne regardais pas beaucoup les italiens ni les français. (…) J’allais à ce qui était mon besoin. (…) Je ne vis pendant longtemps chez les français que ce qui était comme le complément infirme, nostalgique des hollandais. Dans leurs aises, dans leur originalité, dans leur exquise intégrité, ils me paraissaient infirmes, privés de quelque chose.
J’étais faible, un enfant tâtonnant, mais un enfant qui jouissait avec une profondeur sourde d’animal de ce qui pouvait être sa nourriture. 
 
"Mémoires de Dirk Raspe" de Pierre Drieu la Rochelle
 

Commentaires

Sublime. Me fait immédiatement penser à Elie Faure, son Histoire de l'art.

« Vermeer a peint jusqu'au silence rayonnant qui émane des choses amies, jusqu'à l'accueil qu'elles vous font. Cette femme et ce miroir ont l'habitude l'un de l'autre, c'est aussi cette femme qui a déplacé cette pelote de fil, et si ce rideau garde ce pli, c'est que chaque fois qu'elle le soulève, elle le touche au même endroit. »

Son chapitre sur Rembrandt... comme tant d'autres, et notamment celui sur Vélasquez, que lit Belmondo dans Pierrot. Et j'ai la même édition que lui ^^

« C'est beau ça, hein, p'tite fille » : https://www.youtube.com/watch?v=7I6Vuw-IYUk&ab_channel=gsx)

Écrit par : Stéphane Bernard | 25/05/2021

Superbe ! Merci, Stéphane

Écrit par : Frédérick Houdaer | 26/05/2021

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