13/09/2016
POÈME PRESQUE ENGAGé
d’ordinaire
je crains la foule
mais aujourd’hui
au milieu d’elle
sur ce boulevard marseillais grand ouvert
marchant vers la plage où doit se tenir le meeting
le vent et le sel font ce qu’ils veulent
avec mon crâne
avec ma peau
avec la peau des jolies femmes que je repère
en cherchant bien
nous arrivons sur le lieu du rassemblement
mi-herbeux
mi-sablesque
règne un esprit
bon enfant comme on dit
l’ambiance est familiale
comme on dit encore
et je m’ennuie déjà
tous les types autour de moi
ont du ventre
et parlent de révolution
ils se servent de trois sortes d’affiches différentes
pour enlaidir l’endroit
seuls les drapeaux rouges conservent une certaine allure
je tombe sur une libraire de Lyon
qui vient pleurnicher sur mon épaule
au sujet d’une subvention qu’on lui aurait versée
et qu’on lui réclamerait à présent
contrairement à elle
je ne suis pas descendu en car
mais dans la voiture d’un ami
qui passait la musique de Gurdjieff en boucle
dans son auto-radio
que cela plaise ou non à son gamin
assis à mes côtés
un autre fait remarquable concernant mon chauffeur
nous partageons les mêmes goûts en matière de femmes
les noms de Françoise Dorleac et de Monica Vitti
et de pleins d’autres actrices italiennes
ont été prononcés des dizaines de fois
dans l’habitacle
à présent
ce sont d’autres noms qui sont répétés dans les haut-parleurs
j’essaye de me rendre plus réceptif
au jeu des éléments autour de moi
qu’à ces mots d’ordre répétés
ces ré-sis-tan-ces-ré-sis-tan-ces
ri-di-cu-les-ri-di-cu-les
j’applaudis à un discours
que je ne suis pas sûr d’approuver
sur tous les points
même s’il me semble remarquable
que l’orateur cite Homère
et sa mer violette
je ne suis qu’à quelques mètres de celle-ci
je dois faire attention
il est rare que je la mentionne dans un poème
saurai-je éviter les clichés dont on l’affuble si volontiers ?
quelques années passent
je relis les trente premières lignes de ce texte ni fait ni à faire
l’homme politique dont il est question un peu plus haut
n’a pas disparu de la scène politique
même s’il doit en rabattre aujourd’hui
la révolution qu’il appelait de ses vœux
n’est pas survenue
pour le reste
certaines évolutions de la société
trahisons politiques
et autres coups-fourrés des médias
sont loin de lui avoir donné tort
quoi qu’il arrive
il aura au moins eu le mérite de citer Homère au micro
un jour de 2012
sur une plage Marseillaise
F.Houdaer
07:43 Publié dans a.2) MES TEXTES | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
Homère à la bonne mère au bord de la mer...
Écrit par : LASSABLIERE | 14/09/2016
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